Terra Australis (1) : le dernier continent
Quelle est l'histoire de la découverte de l'Antarctique ?
À cette période de l'année où l'on subit les grosses chaleurs(1), je vais vous parler d'un endroit rafraîchissant : l'Antarctique. Commençons par un peu d'histoire.
L'Antarctique est le cinquième et dernier continent à avoir été découvert, mais depuis l'Antiquité, pour une raison d'équilibre de la Terre, Aristote prédit l'existence d'une Terra incognita au pôle Sud. Ce ne sera qu'à partir du XVIe siècle que des expéditions seront envoyées pour la découvrir.
La Royal Society, ainsi qu'Alexander Dalrymple, un hydrographe anglais, sont eux aussi persuadés de l'existence d'une Terra Australis et désirent que l'Union Jack soit le premier drapeau à flotter sur cette terre. Si bien qu'en 1768, ils dépêchent James Cook pour la découvrir. Durant sa première expédition, il ne trouvera pas cette terre inconnue. Mais Dalrymple, soutenu par tous les membres de la Royal Society, reste toujours convaincu de son existence. Tout de suite, ils envoient plus au sud une deuxième expédition, toujours installée sous le commandement de Cook, à bord de La Resolution et de L'Adventure.
Le 17 Janvier 1773, James Cook est le premier à franchir le cercle polaire Antarctique, et son équipe atteint la latitude la plus basse jamais atteinte, 71°10'. Cook ne sait alors pas qu'il se trouve à seulement cent trente kilomètres du dernier continent et fait demi-tour. Il conclut de ses expéditions que Terra Australis n'existe pas. Le mythe d'un continent où il fait bon vivre se brise puisque là-bas, de toute façon, tout n'est que glace. Pourtant, nombreux sont ceux qui y croient encore ; d'autres explorateurs sont envoyés à sa recherche. Le capitaine Fabian von Bellingshausen de la marine russe et le capitaine Edward Bransfield de la marine britannique, ainsi que des chasseurs de phoques, comme par exemple l'Américain Nathaniel Palmerça, partent pour tenter de la découvrir. À quelques jours d'intervalle, ils le verront tous, ce fameux bout de terre. L'existence de l'Antarctique est enfin avérée(2).
La conquête réelle de l'Antarctique et de ses îles commence au XIXe siècle par une conquête industrielle. Sous le besoin croissant d'huile pour s'éclairer et se chauffer en Europe, de nombreuses stations baleinières s'implantent sur les îles de l'océan austral, océan qui regorge de baleines et de phoques. Peu à peu, la chasse à la baleine s'industrialise à bord de bateaux-usines. Ces îles du bout du monde deviennent de vraies cités industrielles avec d'immenses fours à fondre la graisse ainsi que des réservoirs pour contenir la précieuse huile obtenue. En à peine soixante ans, la population de baleines est décimée et leur pêche devient peu rentable.
En parallèle et par la suite, la conquête industrielle laisse place à la fièvre de conquête du continent. Le 21 janvier 1840, nous Français sommes les premiers à planter un drapeau sur la Terra incognita avec, à notre proue, le sieur Jules Dumont d'Urville suivi, quelques jours plus tard, par les Américains. La terre que foule Dumont d'Urville est nommée Terre Adélie, en hommage à sa femme Adèle. Les Anglais sont eux les premiers à faire une véritable expédition scientifique. Sous le commandement de James Clark Ross, l'expédition parrainée par la Royal Society est envoyée étudier le champ magnétique de la Terre.
Cette campagne permettra de cartographier précisément une grande partie de la côte du continent. Puis, suite à la course au pôle Nord géographique vient celle du pôle Sud géographique, qui sera finalement atteint en 1911. D'autres survoleront le continent blanc ou essaieront de le traverser de part en part en traîneau, comme ce sera le cas de Sir Ernest Shackleton.
L'histoire de Sir Ernest Shackleton et de son navire l'Endurance est un récit exceptionnel. Le but de cette expédition britannique est de faire la première traversée trans-antarctique en traîneau à chiens, soit près de trois mille cinq cents kilomètres. Le grand trois mâts utilisé sera pris par les glaces, puis broyé au printemps 1915 et finalement abandonné par l'équipage. Pendant cinq longs mois, ils survivront aux rudes conditions de l'Antarctique sur une banquise à la dérive. Mais la glace, devenue trop instable, contraindra les vingt-huit membres de l'équipage à prendre le large dans trois petites embarcations qui atteindront miraculeusement Elephant island, une île inhabitée. Pour trouver du secours, Sir Shackleton devra partir avec cinq membres de son équipage sur une des embarcations convertie en voilier. Malheureusement, une violente tempête les entraînera du mauvais côté de l'île de la Géorgie du Sud, abîmant par la même occasion leur embarcation, les contraignant ainsi à traverser l'île à pied. Ils réussiront et pourront trouver de l'aide auprès des baleiniers, qui sauveront l'équipage au grand complet. L'expédition est un échec mais l'exploit de Sir Ernest Shackleton est considéré comme l'un des actes les plus héroïques de l'histoire de la navigation. La conquête de l'Antarctique n'est pas chose facile et plus d'un n'auront pas la chance de Sir Shackleton.
Suite à ces expéditions, la course à l'exploration scientifique débute et lors de l'année polaire internationale (1882-1883) et de l'année géophysique internationale, quarante bases scientifiques seront créées. Il paraît très vite nécessaire de réglementer les recherches afin d'éviter tout conflit. Les États abordent alors des questions d'ordres politique et économique vis-à-vis de l'Antarctique. De ces questions aboutit le traité de l'Antarctique, qui attribue au continent un statut de terre de sciences et de terre pacifique où ses ressources naturelles et sa biodiversité doivent être protégées. De nos jours, les expéditions ne sont plus des expéditions d'exploration de la Terra incognita mais des expéditions scientifiques qui étudient le continent et les impacts du changement climatique.
Depuis peu, des paquebots viennent apporter des touristes sur les côtes glacées.