Au royaume de France, comme en bien d'autres contrées alors à la fin du XVIIIe, les unités n'étaient certes pas normalisées(1)(2) ! La lieue d'ici ne valait pas là-bas(3)

Pour exemple :

  • une lieue ancienne avant 1667 : 10 000 en pied-du-roi, soit 3,266 km ;
  • une lieue de Paris après 1668 : 12 000 en pied-du-roi, soit 3,898 km ;
  • une lieue des Postes après 1668 : 13 200 en pied-du-roi, soit 4,288 km ;
  • une lieue tarifaire après 1668 : 14 400 en pied-du-roi, soit 4,678 km.

Le « pied-du-roi » valait, avant 1667, 32,660 cm et 32,484 cm après 1668(4).
La « lieue ancienne » est l'ancienne « lieue de Paris ». Elle est d'un « myriapied ». C'est la lieue officielle jusqu'en 1674.
La « lieue de Paris », avec sa nouvelle définition de 1674, vaut 2 000 toises. Après 1737, elle fut aussi appelée « des Ponts et des Chaussées ».
La « lieue des Postes » de 2 200 toises du Châtelet fut créée en 1737.
La « lieue tarifaire (du transport de grains) » de 2 400 toises date de la même année.
Et la toise vaut 6 pieds…

La longueur ne change pas, mais le nombre de pas dépend du marcheur !

Pas d'uniformité au service des poids et mesures pour vérifier les échanges : ce n'est pas encore très grave si l'on mesure à la louche !
Mais les Encyclopédistes, ces philosophes aux compétences multiples – Diderot, d'Alembert… – et, à leur suite, les membres éminents de la commission des poids et mesures – Jean-Charles de Borda, Nicolas de Condorcet, Pierre-Simon de Laplace, Joseph-Louis de Lagrange et Gaspard Monge – ont un souci de précision et surtout d'universalité(5).

Une mesure de longueur universellement reconnue ? C'est à la Terre bien sûr qu'il faut se référer(6)… Ce sera donc vraiment une référence incontestable aux yeux de tous.
Reste à envisager une unité pratique, ni trop grande ni trop petite, au quotidien(7) et grâce au système métrique, promu avec vigueur par la Convention, on se débrouillera avec la grande famille des multiples et sous-multiples.

C'est ainsi que le mètre est alors(8) défini comme la dix millionième partie du quart de la circonférence terrestre. On pense en effet depuis un sacré bail que la Terre n'est pas plate, mais sphérique, et on ne s'embarrasse pas de menues montagnes, ni non plus d'un aplatissement aux pôles.

Pour moins de déformation, le mètre étalon aura un profil en X.

À la fin des années 1950, on apprenait cette définition dans les écoles primaires et on récitait aussi avec application : « Le mètre-étalon, en platine iridié, est conservé au pavillon de Breteuil. » Bien que la définition scientifique ait changé, cette première définition est facile à concevoir et mérite donc d'être encore validée(9) !

En marbre et installé à Paris par la Convention, un mètre étalon encore en place (encore récemment du moins) rue de Vaugirard en face du Luxembourg.

Voilà donc une belle conception ! Mais comment a-t-on fabriqué le premier mètre-étalon ? Cette question n'était pas évoquée à l'école primaire. Quel dommage !
Nous quitterons donc les assemblées doctes et enthousiastes, mais pas encore les salons d'étude : il faut élaborer une méthode… Ce sera un peu ardu, mais il suffira d'en comprendre le principe pour continuer l'aventure.
Car ensuite, il faudra mouiller la chemise ! Et vraiment, quelle aventure !
Patience…


  1. (1) Ne tirez pas sur les Anglais en premier ! Ils ne sont pas les seuls…
  2. (2) Il n'en a pas été toujours ainsi, aussi étonnant que cela puisse paraître : depuis l'Antiquité jusqu'au IXe siècle, ce n'était pas le bazar dans les souks ! Les unités étaient bien gardées et au-delà des frontières encore…
  3. (3) Rappelez-vous Blaise Pascal : Vérité ici, erreur au-delà des Pyrénées !
  4. (4) Le roi a-t-il changé de pointure ?
  5. (5) Pensez à la Déclaration universelle des droits de l'homme. Des deux sexes mâle et femelle au départ, même si ça s'est gâté de nouveau ensuite pour les Olympe de Gouges et compagnie ! Même pas un nom différent pour l'homme (genre humain) et l'homme (mâle)…
  6. (6) La Terre qui nous porte tous n'appartient à personne, en principe. En pratique, les guerres de territoire pour la propriété du sol (et du sous-sol) existent toujours.
  7. (7) L'homme perdu entre deux infinis… Encore Blaise Pascal ! On a bien essayé, à la mesure de l'homme, la coudée, le pied, l'empan, le pouce (un doigt de porto, mon cher ?), mais rien de plus variable dans le monde vivant !
  8. (8) Ça a changé depuis, pour plus de précision, mais c'est une autre histoire
  9. (9) Donc le périmètre terrestre mesure 40 000 000 m ou 40 000 km. Ça vous permet de calculer le rayon de la Terre ! Comment ? Allez vous rafraîchir la mémoire avec \(\pi\) !

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