HeLa : l'incroyable descendance…
Comment un cancer a-t-il pu rendre Henrietta Lacks presque immortelle ?
Fidèle lecteur omnilogiste, connais-tu l'existence d'Henrietta Lacks ? sans doute pas, et pourtant, ce nom mérite sans doute un petit article sur ce site !
Née en 1920 en Virginie, cette jeune femme noire est d'un milieu très modeste. Mariée à un agriculteur prénommé Day, ils cultivent le coton.
Mais voilà soudain qu'en 1951, Henrietta ressent de très vives douleurs dans le ventre. Repoussant de jour en jour la visite médicale, elle finit par consulter à l'hôpital voisin : la redoutable évidence apparait : il s'agit d'une tumeur maligne sur l'utérus.
De cette triste réalité, partagée dans la douleur par tant de personnes dans le monde, rien qui ne justifie votre article quotidien ! mais si, car après Henrietta Lacks, il convient maintenant de parler de HeLa…
En effet, outre la partie « soins » bien classique dans un hôpital, se trouve aussi la partie « recherche ». Et cette dernière multiplie les expériences in vivo, travaillant sur des cellules humaines. Cependant, la recherche est limitée par la faible durée de vie des cellules utilisées pour ces recherches, qui finissent toujours, plus ou moins vite – et souvent plus que moins – par dépérir.
Le docteur George Gey utilise donc des cellules prélevées sur cette patiente.
Par routine, la laborantine inscrit « HeLa » sur les éprouvettes, reprenant les deux premières lettres des prénom et nom de la « donneuse » malgré elle(1).
Si comme bien souvent les cellules saines dépérissent rapidement, quelle surprise en revanche de voir les cellules cancéreuses rester actives. Et mieux, elles prolifèrent, doublant en quantité chaque jour, de manière exponentielle.
C'est la première fois qu'un tel fait se produit, certains parlant de « cellules humaines immortelles ». Les laboratoires se bousculent pour obtenir leur dose de HeLa, alors même que l'infortunée Henrietta décède de son cancer en octobre 1951.
Mais dans le même temps, son patrimoine ainsi légué à l'humanité traverse les océans, et c'est donc très rapidement dans le monde entier que les recherches sont menées avec ces cellules. Et c'est ainsi avec ces dernières qu'est découvert en 1952 le vaccin contre la polio qui faisait tant de ravage jusque là (2).
Il faut attendre 1973 pour que soit révélé cette influence de HeLa sur la recherche médicale mondiale, et même les années 90 pour connaître sa véritable identité.
L'explication de ce phénomène est au final assez simple. Les cellules normales vieillissent à chaque division cellulaire. Le télomère (brin d'ADN existant dans chaque chromosome) se réduit au fil des divisions et finit rapidement par mourir. La télomérase, présente dans les cellules cancéreuses, reconstitue ce télomère. Elle a été découverte en 2009 et a valu à ses « inventeurs » le prix Nobel de médecine.
Et un peu de l'immortalité de Henrietta…