Aujourd'hui, point d'article pour survivre dans des lieux improbables, ni de traducteur « prépa-humain »(1), ni même encore du curriculum vitæ des guêpes. Non, aujourd'hui est un grand jour – certainement le même que celui du reste de la semaine, mais faites preuve d'imagination ! –, celui où je me propose humblement(2) d'améliorer votre repas quotidien, grâce à une recette entièrement créée par d'autres, mais que je m'approprie sans vergogne, passant ainsi pour la future sauveuse de vos réunions dominicales où vous apportiez des pâtes, faute de mieux.
Ce temps est désormais révolu, cher lecteur, car dès la fin de cet article, vous saurez cuisiner le seul, l'unique, le… Cake au jambon et aux olives.

Stupeur(3) de votre part, l'idée d'impressionner votre moitié/famille/cercle d'amis/autre catégorie de personnes susceptibles de goûter à votre cuisine vous rendrait-elle aphone ? Eh bien, c'est dommage pour vous, même si, ainsi, j'ai la garantie de ne pas être interrompue durant la distribution de mes instructions quasiment militaires.

Tout d'abord, commençons par réunir les divers ingrédients indispensables à cette recette, si cela ne vous dérange pas. Nous aurons donc besoin :

  • de trois œufs suffisamment récents ;
  • de 150 g de farine ;
  • d'un sachet de levure ;
  • de 12,5 cl de lait ;
  • de 100 g de gruyère râpé(4) ;
  • de 200 g de jambon, que l'on peut remplacer par des lardons fumés pour varier ;
  • de 75 à 100 g d'olives vertes dénoyautées(5)
  • de sel et de poivre ;
  • d'un saladier, d'une cuillère ou d'un fouet – qui a l'avantage pour battre les œufs – et d'un moule à cake. Attention, ces trois derniers objets ne sont pas des ingrédients : il est donc très fortement déconseillé d'essayer de les ajouter à la recette !

Vous êtes parvenu à regrouper les divers ustensiles ainsi que les ingrédients ? Très bien, nous pouvons donc commencer le stage Cooking Lagile, qui vous est gracieusement offert par Omnilogie.

  1. Avant de commencer la recette en elle-même, je vous conseille de faire préchauffer votre four – ou celui du voisin, si vous vous appelez Charlotte(6) – à 180°, histoire de ne pas avoir à attendre une fois le gâteau fini.
  2. Maintenant, la véritable recette. Tout d'abord, saisissez-vous délicatement de votre saladier et de votre fouet(7). Maintenant, vous vous saisissez du premier œuf, que vous brisez tout aussi délicatement. Il s'agit ensuite de verser le contenu de la coquille dans le saladier, puis de mettre les coquilles à la poubelle, ou éventuellement dans… votre compost(8) ! Vous faites de même avec les deux autres, puis vous fouettez gentiment(9). Normalement, à ce stade de la recette, vous obtenez un magnifique liquide orange clair.
  3. Maintenant que vous œufs sont prêts à appeler « S.O.S. rejetons battus », vous pouvez commencer à ajouter votre farine. Normalement, quand tout se passe bien, la pâte est bien homogène, jolie, un peu dure sur les bords… Dans la réalité, puisque Murphy veut se joindre à la recette, vous obtenez souvent des grumeaux, sorte d'agglomérats hideux qui vous donnent envie d'abandonner aussitôt. N'y songez surtout pas, malheureux ! Pensez plutôt à la tête déconfite de vos amis quand vous apportez des pâtes – voir plus haut – et remettez-vous à remuer au lieu de rêvasser. Vous continuez d'incorporer, et là, miracle, ces horribles accumulations disparaissent. Hélas, tout a un prix : vous êtes passé d'un truc orangé avec des amas de farine à une pâte plutôt jaune, mais à tendance élastique et qui n'apprécie que moyennement vos coups de fouet. Rassurez-vous, c'est normal.
  4. Une fois qu'on en est ici, que devons-nous faire ? Ouvrir la bouteille de whisky, comme pour la dinde(10) ? Eh bien non, le cake ne compte pas se faire sans votre intervention, nous devons donc nous y remettre. Je vous laisse le soin d'ajouter votre paquet de levure. Attention, le petit sachet n'est pas à ajouter à votre mixture collante !
  5. Une fois que c'est fait, vous allez chercher une casserole. Oui, je sais, elle n'a pas été indiquée dans la liste, mais c'est pour vérifier si vous suivez. Constatant que c'est le cas, nous pouvons donc continuer. Vous prenez le lait, que vous versez dans le récipient, puis vous le portez jusqu'à une source de chaleur. Non, votre petit frère malade a beau avoir quarante de fièvre, il ne suffira pas, préférez plutôt la gazinière/micro-ondes/autre appareil prévu à cet usage(11). Le but n'est pas de faire bouillir, simplement de faire chauffer : il ne sert donc à rien d'attendre que le lait forme cette petite peau caractéristique, due à un rassemblement intempestif de protéines.
    Une fois chaud, vous versez votre lait dans le saladier initial et vous recommencez à remuer. Cette fois, votre pâte redevient un peu plus liquide, ce qui facilitera la suite des opérations.

  6. Cette fois, vous vous munissez de votre boîte d'olives – je demande à ceux qui en ont en sachet de ne pas se sentir exclus – et… d'un couteau.
    « Eh ! Ça non plus, ce n'était pas dans la liste ! », vous écriez-vous. En effet, vous avez parfaitement raison. Pour nous simplifier la vie, je vous propose de découper les olives directement au-dessus du saladier. Une fois vos olives décapitées, remuez de nouveau pour camoufler les restes.

  7. En tant qu'élève consciencieux, vous constatez qu'il ne reste que peu d'ingrédients à ajouter à la recette désormais. Commençons par les dés de porc – rappelez-vous : jambon ou lardons ! Ici, nous avons deux possibilités :

    • soit vous êtes adepte du jambon, et dans ce cas, vous n'avez qu'à ajouter directement les dés dans le saladier, puis à remuer ;
    • soit vous avez envie de lardons, et là, ça se complique. En effet, il faut parvenir à les faire cuire – première exclamation de surprise –, sans vous brûler – deuxième exclamation de stupeur – avec l'huile – évanouissement de l'élève. Allons, allons, réveillez-vous, ce n'est pas sérieux comme attitude ! Allez chercher une poêle, ainsi qu'un peu d'huile et une cuillère – ou tout autre objet permettant d'agiter. Mettez à chauffer, attendez un peu, puis mettez vos lardons dedans. C'est fait ? Il s'agit maintenant de remuer pour éviter qu'ils n'accrochent au fond, puis, une fois cuits, de les faire rejoindre le reste des ingrédients. Maintenant que tout le monde est réuni, ajoutez un peu de sel et de poivre, puis… « Remuez ! ». Mais c'est que vous devenez doué, ma parole !
  8. Tout le monde, disais-je ? Non, un irréductible résiste encore, dans son emballage où il se croit en sécurité… Oui, vous avez deviné : il nous manque le gruyère. Personnellement, j'en mélange une grande partie avec le reste, et en garde un peu de côté.
  9. Maintenant que votre bras est en feu à force de touiller, il est temps de vous saisir du moule à cake et de verser la pâte dedans. Vous prenez votre reste de gruyère, que vous mettez par dessus le tout. Attention, il n'est pas nécessaire de recouvrir le moule en lui-même, mais uniquement la pâte.
  10. Vous prenez votre moule, que vous glissez délicatement dans votre four, vous fermez la porte et vous pouvez vous affaler sur une chaise pendant au moins les trente prochaines minutes.

Vous pensiez qu'une fois au four, votre calvaire était terminé ? Ç'eût été trop simple, voyons ! À partir d'une demi-heure de cuisson, je vous conseille de vous saisir d'un couteau pointu et de « piquer » votre œuvre. Non, ceci n'est pas douloureux pour lui, soyez sans crainte ! Si votre lame ressort humide, vous laissez cuire davantage, si elle est sèche, vous pouvez vous permettre de lui faire quitter le four.
Dans le cas d'un cake au jambon et aux olives, il peut arriver qu'au bout de trois quarts d'heure, le couteau soit toujours « humide ». Si vous voyez que le gâteau a une belle couleur dorée, voire marron clair – je dis bien clair, et non charbon, sinon, c'est simplement brûlé –, vous pouvez le sortir sans trop de crainte.
Pensez à démouler assez rapidement, pour éviter de vous retrouver avec une moitié de cake dans la main et l'autre au fond du plat, ce serait gâcher vos efforts des vingt dernières minutes en très peu de temps ! Vous laissez sur une grille, ou vous mangez tout de suite, selon votre appétit et vos goûts personnels.
Une dernière petite chose : si vous n'êtes ni une créature capable d'imiter le Chat Potté et ses grands yeux larmoyants, ni un colosse, ni particulièrement doué en rhétorique, il faudra aussi songer à faire la vaisselle, mais ça, c'est une autre histoire…


  1. (1) Les prépas sont nos amis, il faut les aimer aussi ! Et réussir à comprendre ce qu'ils racontent…
  2. (2) Et modestement, et de manière totalement désintéressée. Mais si vous comptez m'envoyer un chèque, je saurai m'en accommoder, soyez sans crainte.
  3. (3) Et tremblements, bien évidemment.
  4. (4) Si certains membres de votre assemblée ne ressentent guère d'affinité pour le fromage, vous pouvez vous dispenser de l'ajouter.
  5. (5) Si vos convives apprécient la saveur des noyaux, pourquoi pas, mais je crains qu'ils apprécient moins de se casser les dents dessus.
  6. (6) Que ceux qui n'ont pas reconnu Henry Dès se dénoncent immédiatement !
  7. (7) Non, pas celui-ci, l'autre…
  8. (8) En effet, les coquilles sont faites de carbonate de calcium, ce qui « atténue » l'acidité.
  9. (9) Notez que si vous êtes moins gentil, les œufs sont battus aussi.
  10. (10) Je vous laisse le soin de chercher la recette de la dinde accompagnée de la bouteille de whisky…
  11. (11) L'opération de chauffage est aussi facultative si vous habitez dans une grotte, mais vous risquez d'être confronté à un problème de taille lorsque viendra l'« Opération cuisson ».