Renaud l'a dit même si je devenais pédé comme un phoque, je ne serai jamais en cloque.
Pédé, pourquoi pas, mais pédéraste ou pédophile ?

Ami lecteur, évitons les détails scabreux et soyons simples, allons prendre nos sources chez les Grecs (qui étaient loin d'être pédés comme des phoques, rapport aux latitudes, mais passons).
Pédé, dans la langue moderne, est une abréviation de pédéraste et désigne un homosexuel. Pédéraste et homosexuel sont donc aujourd'hui synonymes, le premier, une insulte, relevant d'un niveau de langue familier, voire grossier.

Le sens de ce mot était toutefois bien différent dans la Grèce antique, société patriarcale et misogyne où – la femme ne tenant qu'un rôle mineur et dénigré – l'éducation était dévolue aux hommes.
Le jeune garçon – « paidos » en grec – était éduqué par un éraste et prenait le nom d'éromène. On était éromène de douze à vingt ans, éraste de vingt à trente explique Dominique Fernandez.
Cette fonction sociale d'éducation était donc temporaire et strictement codifiée. Les Grecs admiraient la pédérastie pure mais reconnaissaient le caractère presque inévitable de relations charnelles entre l'éraste et l'éromène. Toutefois, l'éromène qui prolongeait son rôle au-delà de la première barbe ou qui comptait plusieurs érastes se voyait rejeté au ban de la société.
Adieu, beau mythe d'une société antique libérale et tolérante : ce que nous entendons aujourd'hui par homosexualité, à savoir une relation intime et librement consentie entre deux adultes, était profondément étranger à la société athénienne du Ve siècle avant notre ère.

Le pédophile, lui aussi, aime les enfants – on retrouve la racine grecque dans ce nom – mais il apprécie davantage encore l'enfant dont l'étymologie latine cette fois nous apprend qu'il ne parle pas (infans, celui qui n'a pas la parole). Car le pédophile éprouve une attirance sexuelle pour les enfants.

Pédéraste, pédophile, pédagogue ou pédo-psychiatre ont en commun la relation à l'enfant. La différence réside dans la façon dont cette relation est envisagée.
La langue moderne a oublié l'antique éducation des jeunes dans la confusion qu'elle fait entre « pédéraste » et « homosexuel ». Une distorsion plus qu'une inversion de la langue.