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Seconde partie : aujourd'hui, calculette ou calculatrice, un usage intelligent ?

L'avènement de la calculatrice, puis de la calculette signe la disparition de la règle à calcul. Au passage, le changement de suffixe, de calculatrice à calculette, indique une familiarité nouvelle, mais aussi une diminution de prestige ou de considération que seule la calculatrice conserve de nos jours. La calculatrice est scientifique ou financière ou graphique ou programmable ou même mini-ordinateur. La calculette est un objet d'un prix modique ou même offert en publicité, et fournie en accessoire dans tous les téléphones portables. On la trouve en version attractive, colorée, en version adaptée à gros chiffres et grosses touches…

La calculette est donc devenue un outil banal, qui se rend vite indispensable.
Son emploi en particulier dans les écoles fait naître bien des polémiques : certains enfants oublient leurs tables de multiplication, devenant incapables de faire une simple division, prenant la calculette pour diviser 6 par 2 – je l'ai observé, sans rire, même jaune.
Pourtant cet outil peut et doit être utilisé intelligemment, sous peine de perdre peut-être des capacités plus performantes de notre cerveau par manque d'entraînement.
La connaissance « intime » des fractions(1) nécessite de bien connaître les tables de multiplication. Le calcul mental « de tête » est souvent plus rapide ! Mais il aide aussi à comprendre les propriétés mathématiques et constitue un bon entraînement cérébral de nos neurones, l'appréciation rapide d'un ordre de grandeur est un élément indispensable de détection des résultats aberrants et, à moins de vivre en permanence équipés de calculette, savoir griffonner quelques opérations sur un coin de papier peut dépanner ceux qui en sont encore capables.
Dans notre vie quotidienne, l'aptitude à calculer mentalement est un avantage, le savoir des techniques « à la main » fait partie de notre patrimoine, pour les quatre opérations du moins. Pour autant que ceux qui regrettent de ne plus extraire de racines carrées « à la main » lèvent la main !

On peut utiliser la calculette de façon intelligente, comme nous allons vous le proposer.
La calculette a des défauts et il faut d'abord apprendre à les reconnaître, car tous ces petits modèles bon marché n'ont pas les mêmes…
C'est l'occasion d'utiliser la découverte de ces défauts et de comprendre les priorités(2) entre opérations et le rôle des parenthèses(3), donc apprendre à lire et écrire un calcul complexe. On apprend à comprendre ce qu'est une valeur approchée, un arrondi, à se méfier parfois(4)
Si vous répétez une multiplication plusieurs fois, vous obtenez ainsi les puissances d'un nombre(5)… jusqu'à la limite d'affichage de l'écran ! D'ailleurs quand un résultat dépasse les capacités d'affichage, pour certaines calculettes(6), on peut expliquer la notation scientifique des (grands et petits) nombres par exemple \(2,4 \times 10^8\)} pour 240 000 000, c'est-à-dire deux cent quarante millions !
La bête calculette vous permet d'effectuer des multiplications gargantuesques comme \(3 435 697 842 \times 12 045 337 = 41 384 138 337 062 754\) (7). Vous pouvez aussi sans peine effectuer des divisions euclidiennes, c'est à dire avec quotient entier et reste(8). La calculette peut donc être un outil d'apprentissage. Sans oublier que les enfants apprennent très vite à écrire SOLEIL(9), on peut leur communiquer un esprit critique, réfléchi et parfois rêveur sur les trésors de ressource de l'esprit !

L'usage de la calculette permet aussi un apprentissage très difficile pour certains : l'esprit encombré par la hantise des opérations à effectuer, certains perdent tout à fait le sens des opérations alors que, l'esprit libéré par la calculette, ils peuvent aborder la résolution de problèmes, problèmes scolaires artificiels ou problèmes réels par exemple concernant un projet de classe.

Les toutes bêtes calculettes sont malgré tout fournies souvent avec un petit mode d'emploi : apprendre à le déchiffrer est un exercice utile… quant au mode d'emploi d'une calculatrice, scientifique, financière, statistique, graphique ou programmable, jeter ou perdre ce précieux petit bouquin est un gâchis monumental ! Vous pouvez le lire dans plusieurs langues(10). Étudier les modes d'emploi est une tâche instructive et fructueuse. Beaucoup utilisent une calculatrice potentiellement performante pour une simple multiplication comme \(0,25 \times4\) – rappelant ces terribles 4X4 qui ne font que Paris-Versailles…

La calculatrice élaborée, scientifique ou financière, est un outil digne d'un professionnel, utilisé à moitié de ses capacités par les étudiants, voire moins pour les lycéens ; les collégiens utilisent la calculatrice scientifique pour tout calcul de trigonométrie, mais ignorent cependant la plupart des autres propriétés. Au niveau du lycée, la calculatrice graphique peut devenir un formidable outil d'apprentissage illustrant facilement l'étude des fonctions. Certains apprennent plus rapidement à dessiner sur leur écran, comme les plus petits avaient écrit fièrement SOLEIL(11)
La calculatrice programmable, dont les premiers modèles initiaient à la démarche de programmation, demande un travail intelligent et rigoureux, mais la plupart font office trop souvent d'anti-sèches perfectionnées(12).

Quant à l'ordinateur, de PC, calculateur personnel(13), il est maintenant beaucoup utilisé par les particuliers comme instrument de communication, les administrations et entreprises ne sauraient plus s'en passer en gestion, mais certains logiciels permettant des tableaux de calculs variés en font un outil prodigieux d'aide au calcul…
La calculatrice, comme le téléphone, évoluent vers l'ordinateur miniaturisé. Pour quel usage ?

Nos outils ne sont pas responsables de l'usage que nous en faisons !
Libre à nous d'agir avec intelligence…


  1. (1) C'est-à-dire assez acquise pour devenir « naturelle », comme la marche devient automatique au cours de la deuxième année de l'enfant.
  2. (2) Tapez successivement \(2 + 3 \times 4 =\) Si vous obtenez 20, votre calculette a commencé par l'addition ; si vous obtenez 14, votre calculette a commencé par la multiplication.
  3. (3) On utilise les parenthèses pour éviter les ambigüités et indiquer le calcul à effectuer en priorité, c'est-à-dire en premier. Par exemple, \((2+3) \times 4 = 5 \times 4 = 20\) et pour éviter de mettre des parenthèses partout, en langage mathématique, on lit toujours \(2 + 3 \times 4\) comme \(2 + (3 \times 4) = 2 + 12 = 14\).
  4. (4) Vous tapez successivement \(2 \div 3 =\) La calculette ne donnera pas de valeur exacte (inaccessible pour elle) : si vous obtenez 0,666 666 6, c'est une troncature (on coupe à la tronçonneuse les chiffres suivants) ; si vous obtenez 0,666 666 7, la calculatrice a arrondi, choisissant la valeur approchée la plus proche de la valeur exacte \(\frac23\) ; si vous tapez \(2 \div 3 \times 3 =\) et que vous obtenez 0,999 999 9, votre calculette vous a joué un sale tour bien involontairement !
  5. (5) Tapez \(1 \times 3 = = = =\) puis \(3 \times 1 = = = =\). Suivant le type de calculette, vous obtiendrez 3 et y resterez (la multiplication par 1 est répétée) ou vous obtenez successivement 3, 9, 27, 81 (et c'est donc la multiplication par 3 qui se répète) ou vice-versa : vous saurez ainsi quel est le facteur concerné par la répétition.
  6. (6) Affichant par exemple 2,4E8 !
  7. (7) Il suffit d'effectuer à la calculette la multiplication par blocs (groupes de trois chiffres par exemple) et de disposer avec soin les produits obtenus avec le décalage adéquat, puis d'additionner, pourquoi pas à la calculette, les produits en colonnes sans oublier les retenues ! Ce nombre est par contre bien difficile à nommer…
  8. (8) Vous tapez par exemple \(365 \div 7 =\). Vous oubliez superbement toute la partie décimale (une troncature à l'unité), vous tapez donc \(52 \times 7 =\) c'est-à-dire ce quotient entier multiplié par le diviseur, vous trouvez 364, le reste est donc 1. Vous pouvez taper 365 – 364, ou même directement 364 – 365 à condition d'ignorer l'inévitable signe – (moins). En passant, le Jour de l'An se décale d'un jour par année non bissextile.
  9. (9) Si vous ne savez pas comment faire, attendez un peu, on vous le dira…
  10. (10) Outre le plaisir de devenir polyglotte, certaines traductions sont parfois éclairées par quelques coups d'œil jetés à la version anglaise, d'origine le plus souvent ! Le problème est réel pour de nombreux modes d'emploi de kits ou d'appareils divers, heureusement moins grave pour les calculatrices, sauvés que nous sommes par la langue mathématique.
  11. (11) Tapez 713 705 et retournez l'écran.
  12. (12) Si l'utilisateur a lui-même su saisir les informations, ma foi ! il les connaît déjà un peu et il a appris à programmer son outil, ce qui n'est pas si mal. Sinon, c'est banal !
  13. (13) Traduction fidèle de Personal Computer.