Sujet d'actualité(1) : Pluton !

Quelques-unes des premières images précises envoyées par New Horizon lors de son approche de Pluton.

La sonde New Horizons
La sonde New Horizons

En effet, voilà qu'après un vol de neuf ans et six mois à la vitesse tranquille de 58 536km/h(2) lancée avec pour objectif la neuvième planète Pluton, la sonde New Horizons arrive à destination !

Et oui, j'ai bien écrit « la neuvième planète » car à son lancement, en janvier 2006, Pluton était encore une planète ! Ce qu'elle n'est plus (au grand dam de certains) depuis 2006(3). Mais pourquoi cette rétrogradation, au fait ?

Revenons quelques années en arrière, plus précisément en 2003, date à laquelle des astronomes découvrent 2003 UB313, un objet transneptunien(4) d'une taille similaire à Pluton, rapidement surnommée « Xéna » par ses découvreurs, à la fois en référence à Xéna la guerrière et car le nom, commençant par un « X », s'adaptait bien à une possible dixième planète.

Mais justement, est-ce là vraiment une dixième planète ? Cette question, ainsi que la perspective de trouver d'autres objets du même acabit dans un futur proche (Hauméa, un autre objet objet transneptunien de grande taille, sera repérée en mars 2003) amènent l'UAI à se décider sur la définition précise d'une « planète ».

Et tout ceci, bien évidemment, dans de multiples débats qui durèrent plusieurs années, pendant lesquelles d'autres objets de taille approchante furent découverts, relançant de plus belle lesdits débats.

Pendant tout ce temps, Pluton restait une planète, et 2003 UB313/Xéna un… objet indéterminé. Et c'est finalement en Août 2006 que l'UAI finit par décider, suite à un vote, de la définition d'une planète :

Une planète est un corps céleste qui :

  1. Est en orbite autour du Soleil ;
  2. A une masse suffisante pour que sa gravité propre vainque les forces de cohésion interne de façon qu'il parvienne à une forme (presque ronde) en équilibre hydrostatique ;
  3. A éliminé le voisinage autour de son orbite.
— L'Union astronomique internationale, définition d'une planète.

La règle no1 est assez logique, permet d'éliminer (dans une certaine mesure) les satellites des planètes, mais exclut également de la définition d'une planète les « planètes errantes », ces planètes voguant entre les systèmes solaires(5).

La règle no2 utilise tout un tas de termes compliqués pour dire simplement qu'il faut qu'elle soit à peu près ronde (l'idée plus précise indique qu'il faut que l'objet soit assez massif pour que sa seule gravité l'oblige à prendre une forme plus ou moins sphérique).

Et enfin, la règle no3 indique en fait qu'il faut que l'objet ait éliminé tout « concurrent » au rang de planète de son orbite, histoire entre autres qu'il n'y ait pas deux planètes sur la même orbite (ça ferait désordre).

C'est là que le bât blesse pour Pluton… Il satisfait aux deux premières règles, mais son satellite (qui est donc sur la même orbite solaire) est énorme comparée à lui : presque la moitié de sa taille !

Pluton et son principal satellite, Charon.

Pluton n'entre donc pas dans la définition d'une planète, mais dans celle d'une planète naine :

Une planète naine est un corps céleste qui :

  1. Est en orbite autour du Soleil ;
  2. A une masse suffisante pour que sa gravité propre vainque les forces de cohésion interne de façon qu'il parvienne à une forme (presque ronde) en équilibre hydrostatique ;
  3. N'a pas éliminé le voisinage autour de son orbite.
  4. N'est pas un satellite.
— L'Union astronomique internationale, définition d'une planète naine.

Les règles no1 et no2 ne changent pas, mais on note que la règle no3 est désormais changée, et indique, logiquement, qu'une planète naine satisfait aux conditions de définition d'une planète, sauf pour cette règle-ci : d'autres objets de taille non-négligeable peuvent partager son orbite.

La règle no4 est présente uniquement pour assurer une non-confusion entre les satellites et les nouvellement définies planètes naines.

Notons au passage que, dans ces définitions, il n'est nullement question de taille (outre le fait qu'elles doivent être assez grosses pour être globalement sphériques).
Ainsi, Mercure, bien qu'elle soit plus petite même que certains satellites (Ganymède de Jupiter ou Titan de Saturne, par exemple), conserve son statut de planète, car elle est seule sur son orbite.

Bref, voilà donc que fin 2006 les choses sont mises au clair : Pluton n'est plus une planète mais une planète naine, et c'est également dans cette catégorie que rentre Xéna. D'ailleurs, à présent que sa nature est fixée, Xéna va pouvoir obtenir un vrai nom, qui sera (notamment en référence aux tumultes et nombreux débats qu'a engendré sa découverte) Éris, nom de la déesse grecque de la discorde !

Éris et son satellite Dysnomie, d'après la déesse grecque de l'anarchie


  1. (1) Du moins au moment où cet article est rédigé, soit, pour les générations futures, en Juillet 2015.
  2. (2) Rien que ça ! Ce qui en fait d'ailleurs l'objet artificiel le plus rapide jamais créé.
  3. (3) D'ailleurs, Pluton faisant le tour du soleil en 248 ans -terrestres- environ, entre sa découverte en 1930 et sa rétrogradation Pluton n'aura même pas fait un tour entier du Soleil en tant que « planète »…
  4. (4) C'est-à-dire un objet dont l'orbite autour du Soleil est plus grande que celle de Neptune, la planète gazeuse la plus éloignée du Soleil.
  5. (5) Et qu'il faudrait donc appeler en toute rigueur des « objets libres de masse planétaire », mais soyons sérieux deux minutes, « planète errante » est beaucoup mieux.

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