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Maintenant que nous avons vu la découverte puis la conquête des Amériques au travers du partage du monde qui a donné naissance au Brésil, intéressons-nous à l'installation des colons européens dans ce Nouveau Monde.

Les Espagnols, tout comme les Portugais, sont prompts à mettre en place la structure politique et sociale de leurs colonies.

Tout d'abord, la politique : les colonies espagnoles sont administrées sous la forme de vice-royautés, où le roi d'Espagne délègue une partie de ses pouvoirs au vice-roi en place. Sont ainsi créés les vices-royautés de la Nouvelle-Espagne (le grand Mexique) dès 1535, de Nouvelle-Grenade (à peu de chose près la Colombie actuelle), du Pérou et du Río de la Plata (un bon morceau de l'Argentine) au XVIIIe siècle.
Les Portugais ne sont pas en reste et fondent la vice-royauté du Brésil, qui deviendra par la suite l'Empire du Brésil.
À côté de cela, il existe d'autres territoires détachés de ces vices-royautés, mais qui sont pourtant sous domination espagnole. Il s'agit de colonies moins vastes, mais qui sont relativement isolées par les conditions géographiques des autres territoires. C'est ainsi que le Guatemala, le Venezuela, Cuba et le Chili sont érigés en Capitaineries générales, plutôt qu'en véritables vice-royautés.

Vices-royautés

La hiérarchie est très stricte, en plus d'être raciste. Prenons l'exemple espagnol, qui est à peu de chose près celui adopté par le Portugal. Le roi détient le pouvoir principal dans les colonies. Son vice-roi, qui est un noble de la cour exerce en son nom le pouvoir dans son territoire.
Les créoles sont des Espagnols nés en Amérique latine. Ils ont un pouvoir important, mais néanmoins inférieur à celui des Espagnols venus d'Europe. Grands propriétaires terriens, ils ont accès à l'éducation.
En dessous, l'on trouve les métis, qui sont issus des mélanges entre Espagnols et indigènes. Assez déconsidérés, ils sont tout de même généralement artisans ou petits propriétaires terriens.
Plus on s'éloigne de la « pureté » du sang espagnol, moins la hiérarchie vous sourit : ainsi, les indigènes et les esclaves qui viennent souvent d'Afrique sont chargés des travaux les plus pénibles au sein des exploitations agricoles ou des mines.
Entre les deux, on trouve également une maigre classe composée des métissages divers. Ce sont les mulatos et les zambos. Les premiers sont dits mulâtres en français : ils sont issus d'ascendances africaines et européennes. Tandis que les zambos naissent d'unions entre Amérindiens et Africains. On obtient ainsi une large diversité qui fait aujourd'hui encore toute la richesse culturelle de l'Amérique latine, malgré le lourd passé d'oppression de ces populations, passé qui continue d'avoir de trop grandes conséquences sur le présent.

La diversité en Amérique Latine

Comment en arrive-t-on aux indépendances ? Faisons si vous le voulez bien un petit saut dans le temps. (1) Nous voilà au XIXe siècle. Cela fait trois cents ans que l'Amérique latine est sous la férule européenne. Alors que le Portugal et l'Espagne étaient les deux puissances majeures du XVIe et XVIIe siècle, voici qu'elles s'affaiblissent de plus en plus. Le contrôle des immenses territoires s'amenuise, déjà au XVIIIe. L'Angleterre et la France sont les puissances montantes de l'époque, et les Ibères croulent sous les dettes. Quant aux créoles, ils produisent toujours plus de richesses, ce qui, loin de soulager les maîtres de la métropole, les affaiblit encore un peu plus. Les créoles ont de plus en plus de pouvoir dans leurs colonies. Les tensions s'accroissent… Un nationalisme colonial commence à émerger.
La Révolution française, suivant de près la révolution américaine, a dans ces pays un écho retentissant. Les valeurs humanistes sont de plus en plus reprises. C'est l'invasion de l'Espagne par Napoléon Bonaparte et la destitution du roi d'Espagne qui va précipiter les choses. Napoléon voulait atteindre le Portugal, allié proche du grand ennemi anglais. Il est donc tout simplement passé par l'Espagne(2). Et là, c'est le drame.
Qui désormais donne les ordres à la noblesse créole ? Les vices-royautés s'administrent elles-mêmes, de manière indépendante les unes des autres. Lorsque la chute de Napoléon permet le retour du roi légitime sur le trône d'Espagne, il est trop tard. Les locaux ont pris goût à l'absolutisme(3).
Les révolutions, menées par Simon Bolivar et San Jose, mettent fin à la domination de l'Espagne, qui n'a plus les ressources de s'imposer de nouveau.


  1. (1) Je reconnais avoir déjà fait un large bond en passant de 1535 au XVIIIe siècle plus haut, mais vous n'avez rien vu. Vous n'avez rien vu… OK ?
  2. (2) Quoi de plus normal en effet ?
  3. (3) Comme on les comprend !