Cette fois le Professeur et son jeune élève sont tous deux en pleine rue. Dans ce monde imaginaire qu'ils parcourent, le soleil baigne les lieux d'une lueur qui réchauffe les cœurs et les corps (eh oui !). Soudain le Professeur, après avoir constaté la présence d'un obstacle sur sa route, décide de descendre sur la chaussée qu'il emprunte sur quelques mètres avant de remonter sur le trottoir. Son apprenti s'interrompt dans ses déambulations et l'interroge à voix haute :

— Professeur, pourquoi ne pas simplement être passé sous cette échelle, posée contre le mur ? Il n'y a de toute évidence aucun ouvrier au travail par un temps pareil et rien n'y est fixé ; elle ne représente en soi aucun danger. De plus elle me semble bien amarrée au mur !

Le Professeur sourit, du rictus de celui qui sait des choses qu'il aime à partager.
— Mon jeune apprenti, penses-tu vraiment que la coutume qui veut qu'il soit interdit de passer sous une échelle dépend seulement du danger effectif qu'elle représente ?
— Que voulez-vous dire ? rétorque l'apprenti en passant vaille que vaille sous le triangle formé par l'échelle, le sol et le mur.
— Ce que tu viens de faire, mon ami, est un véritable blasphème envers la personne divine. Ne sais-tu pas que le sol, le mur et l'échelle forment un triangle parfait et que la religion chrétienne sacre la trinité ? « Briser » ce triangle en passant au travers est une preuve que tu te moques bien de la Sainte Trinité que représentent le Père, le Fils et le Saint Esprit. C'est un sacrilège et Dieu, s'il existe, sera bien vite mis au courant ! Tu ne veux tout de même pas attirer sa colère ?
— Non bien sûr, Professeur. Mais je me figurais que vous ne croyiez pas en Dieu ?
— Pas en tant que tel, mais je parie comme Pascal ; s'il existe je préfère le contenter que lui déplaire !
Le Pari de Pascal ?
— Nous verrons cela un autre jour. Maintenant cesse de blasphémer et retournons marcher, si tu veux bien ! conclut le mystérieux Professeur dans un sourire.