Tout contemporain, et donc tout fidèle lecteur omnilogiste, est toujours tenté de juger l'histoire à l'aune d'un jugement correspondant aux valeurs actuelles.

Et c'est ainsi que des pans entiers de l'histoire sont condamnés. Parfois sans doute à juste titre.

Et justement, qu'en est-il de ces célèbres lettres de cachet ? scandaleux arbitraire ou pas ?

lettre de cachet

C'est au XVIe siècle que l'on voit apparaitre officiellement ces documents, alors même qu'ils existaient de plus longues dates. Aucune séparation des pouvoirs alors, bien au contraire, puisque le Roi les centralisait tous : législatif, exécutif et judiciaire ; au nom de Dieu qui plus est.

Il pouvait exercer lui-même cette Justice, alors qualifiée de « retenue », ou la confier à des Officiers ; elle était alors « déléguée ».

À l'origine, c'est dans le cadre de cette Justice retenue que s'appliquent les lettres de cachet, correspondant à un lien direct entre le souverain et son peuple. Le contenu de la lettre est un ordre royal, dont le secret impose que la lettre soit cachetée avec le sceau royal. Il s'agit alors de défendre la sécurité du Royaume et les graves atteintes à l'ordre public.

Au fil du temps, cette lettre peut être signée d'un secrétaire d'État, puis de divers « fonctionnaires » royaux.

Et des intérêts généraux, ce sont au fil des jours des intérêts plus particuliers – jusqu'à très particuliers – qui font l'objet de ses lettres de cachet, qui rappelons-le ne sont pas systématiquement des ordres d'incarcération. Mais bien souvent tout de même !

Le Lieutenant de Police, ancêtre de nos policiers actuels, reçoit et instruit les plaintes relevant de sa compétence : contentieux divers, dettes non remboursées, adultères, hérésie, folie… Il convient d'aller vite, et avec discrétion. Le secret de la procédure permet de gagner en efficacité dans ces deux domaines !

L'internement se fait en un lieu spécifique, à l'écart des condamnés de droit commun, l'entretien étant à la charge de la famille.

cachot

Le système fonctionne si bien qu'il faut trouver de nouveaux lieux de détention : couvents, hôpitaux, dépôts de mendicité viennent renforcer la Bastille(1) ou le château de Vincennes.

Il apparait donc bien que c'est une déviance d'un système au départ sans doute louable qui amena les excès de l'usage de ces lettres de cachet, dénoncées par les philosophes de la Révolution, qui en obtiendront donc l'abolition par l'Assemblée Constituante en 1790.

Mais c'est bien vite oublier que ce poison sera très rapidement remplacé par un poison encore bien pire distillé par la Terreur qui décapitera alors avec autant de zèle et d'entrain que certains passaient quelques jours au cachot auparavant pour des motifs tout aussi futiles, voire imaginaires.


  1. (1) Rappelons qu'un seul détenu par lettre de cachet ne s'y trouve pourtant lors de sa célèbre prise par les révolutionnaires.