Comme moi, peut être avez-vous eu un jour la chance de voir, parmi les objets insolites de votre grand-père, un engin qui ressemblait plus ou moins à celui-ci :
Radiomètre de Crookes

Prenant l'objet avec le plus grand soin, vous avez fini par découvrir son secret : quand on le place au Soleil, l'hélice à l'intérieur se met à tourner : d'abord lentement, puis de plus en plus vite. Par contre, si vous le replacez à l'ombre, l'hélice ralentit puis s'arrête.
Passées les années d'innocence et d'émerveillement face à cet objet qui vous semblait presque magique, vous avez commencé à vous interroger(1) sur ce radiomètre de Crookes, puisque tel est son vrai nom.

William Crookes
William Crookes

Reprenons donc : on place le radiomètre au Soleil, il tourne. La question est pourquoi ? , ou plutôt Comment ? La seule chose qui entre à l'intérieur sont les rayons du soleil ; il faut donc chercher de ce côté là. Comment ceux-ci peuvent-ils faire tourner l'hélice ?
On a longtemps cru que c'était la lumière qui la faisait tourner et que cela montrait la pression radiative des photons qui s'exercerait différemment sur la face argentée de l'ailette et sur sa face noire. Crookes lui-même donnait cette explication. Cependant, si tel avait été le cas, l'hélice tournerait dans l'autre sens : la face argentée pousserait la face noire et non l'inverse comme on peut le constater. Nombre de grands physiciens se sont d'ailleurs cassé les dents sur ce problème.
Réalisons quelques expériences complémentaires : si vous exposez le radiomètre à une lumière qui ne chauffe pas – une lampe à néon ou une ampoule économique par exemple – il ne tourne pas. Par contre, si vous le chauffez entre vos mains, il tourne. De même, si vous essayez de la mettre au réfrigérateur il tourne encore, mais cette fois dans l'autre sens. Ce n'est donc pas la lumière, mais bien la chaleur qui est responsable du mouvement de l'hélice.

Oui mais concrètement, comment ça marche ?
À l'intérieur du radiomètre règne un vide presque – et seulement presque – complet. La face noire s'échauffant plus vite que la face argentée, les molécules d'air se trouvant du côté noir percutent l'ailette plus rapidement que celles se trouvant du côté argenté. Cela va créer une différence de pression à l'origine de la rotation.
On peut cependant ajouter qu'il est possible de vérifier l'hypothèse de Crookes, à savoir que les photons peuvent faire tourner l'hélice. Il affirmait en effet que la face argentée réfléchissant les photons – et la face noire les absorbant – la seule action de la lumière ferait tourner l'hélice (la face argentée poussant la face noire). Mais pour cela, il faudrait que le vide à l'intérieur soit véritablement parfait(2).

Pour conclure, rappelons juste que le radiomètre de Crookes n'est pas un jouet, mais un objet à la fois ludique et pédagogique. Bien que l'objet en lui-même semble simple, l'explication du phénomène a quand même donnée du fil à retordre à de nombreux physiciens et chercheurs.


  1. (1) La curiosité fait partie des qualités d'un lecteur d'Omnilogie.
  2. (2) L'expérience a d'ailleurs été réalisée et l'hélice tournait bien dans le sens prévu.