Vampirisme ou porphyrie ?
Quelles sont les origines du mythe vampire ?
Une hypothèse « scientifique » fut avancée pour expliquer la présence des légendes vampiriques en Europe de l'Est : on observa en effet qu'une maladie réunissant plusieurs symptômes de l'état vampirique était particulièrement courante en raison des mariages consanguins – il s'agit de la porphyrie, maladie congénitale du sang qui se manifeste généralement par plusieurs symptômes détaillés ci-dessous.
- Une pâleur cadavérique due à une pénurie d'hémoglobine dans le sang et aux médecins qui préconisent de vivre dans l'obscurité.
- une pilosité abondante (hypertrichose) dont Stoker affuble justement Dracula dans son roman ;
- une déformation des dents (érichrodontie) et la disparition d'une partie des gencives, donnant un effet carnassier au malade ;
- une coloration pourpre des dents et des lèvres, en raison de dépôts de porphyrines (substance due à la perte d'hémoglobine, qui donne son nom à la maladie) ;
- une sensibilité accrue au soleil (photodermatite). Lorsque le corps du malade est exposé au soleil, la molécule de porphyrine reçoit l'énergie solaire et la convertit en une énergie toxique pour les cellules corporelles. Les parties les plus exposées au soleil – la peau donc – sont les plus vulnérables à ce genre d'attaque ;
- l'ail provoque des crises chez le malade (cette plante contient un composant chimique qui agit malencontreusement avec plusieurs enzymes du foie – très douloureux pour les personnes atteintes de porphyrie) ;
- troubles neuropsychiatriques : ceux qui sont atteints de porphyrie deviennent parfois très violents et irritables.
On reconnaît bien là de nombreux points du folklore vampirique, cercueils et miroirs en moins. Mais contrairement au vampirisme, la porphyrie n'est aucunement transmissible.
Le traitement valable de la maladie était la saignée, dont les malades contrebalançaient les effets en buvant du sang de bœuf(1) – un schéma d'extraction-absorption qui rappelle encore une fois les légendes vampiriques.
Mais le hic… c'est que ça n'a pas grand-chose à voir avec les vampires du XVIIe siècle : Dracula ne se balade-t-il pas dans les rues de Londres en plein soleil(2) ? À l'époque, les vampires sont considérés comme « aussi frais que s'ils étaient en vie » ; ce qui n'est malheureusement pas le cas des malades qui sont défigurés à la moindre exposition au soleil. Dernier clou dans le cercueil : à l'époque, les contes de vampires sont extrêmement rares, et la maladie l'est encore plus (de nos jours, on dénombre moins de 200 cas). Peut-être faut-il donc se résoudre à l'idée que si le porphyrisme explique les vampires contemporains, leurs ancêtres avaient d'autres origines…