Les fameux confettis de papier que l'on jette aujourd'hui à Carnaval, ou lors d'autres fêtes populaires, vous savez ceux que l'on retrouve une semaine après dans un pli de vêtement, et bien, ces confettis n'ont pas toujours été sous cette forme.

Confetti signifie dragée en italien. Et ce n'est pas pour rien ! En effet, à l'origine de cette tradition, ce sont des dragées que l'on lançait dans la foule. L'origine se situant peut être autour du XVIIe siècle, même si on retrouve encore parfois ces lancers de bonbons en Allemagne aujourd'hui.

Mais, apparemment ces dragées ont rapidement été remplacées par des sortes de boulettes moitié-plâtre moitié-amidon/sucre. Comme l'explique l'abbé Richard en 1770 à propos du Carnaval de Rome :

Une sorte de politesse est de jeter des dragées [… ] aux gens de sa connaissance [… ]. Mais comme ces dragées se perdaient en partie dans la boue ou dans la poussière, on a imaginé d'en faire de très-petites de plâtre et d'amidon, qui sont plus lourdes et plus propres à l'usage auquel on les emploie.

Mais alors d'où proviennent les confettis de papiers comme nous les connaissons ?
Autour des années 1875, quelqu'un(1) a eu l'idée d'utiliser et de commercialiser les chutes du papier utilisé pour l'élevage de ver à soie à la place des boules de plâtres. L'idée a très rapidement plu et s'est répandue mondialement à partir des années 1890, à Paris notamment.

Bataille de confettis

Mais que vient faire l'élevage de ver à soie là-dedans me direz-vous ? Je pense qu'une petite explication sur la sériciculture(2) s'impose.

La soie des vers à soie provient du dévidage des cocons des vers à soie. Vers à soie qui en réalité sont des chenilles, celles du papillon Bombyx mori. La sériciculture commence par l'incubation de « graines », les œufs de papillon, mi-avril dans des conditions adéquates(3). Puis, régulièrement tout au long des cinq mues des larves précédant la formation des cocons, il faut débarrasser les vers de leurs déjections et des feuilles de murier qu'on leur avait donner à manger, et qu'ils ont souillées. Mais il faut le faire sans toucher les vers pour ne pas les meurtrir. Cela s'appelle le délitage.

Pour effectuer cette opération, il faut poser des feuilles de papier percées au-dessus des chenilles, et de nouvelles feuilles de murier par dessus. Les vers montent alors chercher les feuilles fraîches pour manger. Et il est alors possible de retirer précautionneusement l'ancienne litière. Les vers, vers le huitième jour après leur quatrième mue, perdent l'appétit, bougent beaucoup plus et changent de couleur. Ils sont dit « mûrs », et si ils trouvent des rameaux de bruyère où s'abriter, alors ils formeront leur cocon.

Ici, on aperçoit le papier percé sous les feuilles :
Délitage

Bref, vous aurez remarqué dans ce processus l'utilisation de feuilles de papier percées, qui génèrent donc des chutes correspondantes aux perçages effectués. Ces petits disques de papier devenant nos fameux confettis modernes. Paris, à une époque, a même exporté à l'étranger ces confettis de papier. Bon, depuis ces débuts, la production de confettis s'est détachée de la sériciculture. Il faut dire qu'à l'époque les confettis (de plâtre ou de papier) étaient utilisés en grandes quantités. En témoigne le Petit Journal du 21 mars 1895 décrivant la place de l'Opéra : [… ], le sol en était jonché à ce point qu'on enfonçait dedans jusqu'aux chevilles !

J'évoquerais simplement pour terminer les problèmes d'hygiène causés par ces confettis qui ont amené à l'interdiction de leur utilisation à Paris entre 1919 et 1932 ! En effet, leur ramassage destiné à les relancer, amenait à ramasser les détritus de la rue, et les germes qui s'y logent.

Voilà pour cet omnilogisme réunissant confettis et ver à soie par l'intermédiaire d'une idée de réutilisation des chutes et déchets d'une production qui séduirait beaucoup de monde aujourd'hui(4).


  1. (1) L'ingénieur Enrico Mangili ? ou physicien atomiste de Trieste Ettore Fenderl ? ou quelqu'un d'autre à Carnaval de Pau en 1880 ? Il y a une certaine incertitude à ce sujet.
  2. (2) L'élevage de ver à soie pour ceux qui n'ont pas suivi.
  3. (3) Relativement chaude (en augmentation jusqu'à 23°), un peu humide, et aérée.
  4. (4) Cela dit, il ne faut cependant pas oublier la question du nettoyage et de la dissémination dans les égouts et finalement dans les cours d'eau de ces masses de confettis.