Les contraintes présentes à l'intérieur des larmes bataviques

Les larmes bataviques sont des larmes de verre. Elles sont appelées ainsi car c'est en Hollande qu'on les a fabriquées pour la première fois. Les Anglais les appellent les larmes du prince Rupert, du nom du neveu du roi Charles Ier qui les a introduites en Angleterre afin qu'elles soient examinées par la Royal Society en 1660. Elles sont fabriquées tout simplement en faisant tomber une goutte de verre dans de l'eau froide et ont une étrange propriété : elles sont extrêmement résistantes. On peut taper dessus avec un marteau sans qu'elles ne cassent. Mais une autre propriété est encore plus étonnante : si l'on vient à rayer la surface de la larme de verre ou à casser sa queue, celle-ci explose littéralement en milliers de morceaux. Vous n'êtes pas convaincu, vous êtes sceptique ? Allez donc voir cette vidéo.

Vous voulez l'explication de ce phénomène ? La voici : en tombant dans l'eau, l'extérieur de la goutte de verre se refroidit très vite, mais le verre n'étant qu'un piètre conducteur de chaleur, l'intérieur, lui, se refroidit beaucoup plus lentement. Le verre, comme l'eau, a la propriété d'avoir un volume plus important à l'état solide qu'à l'état liquide. Cette propriété est à la base du phénomène : le verre qui se refroidit lentement à l'intérieur est emprisonné dans un volume défini par l'extérieur de la goutte, déjà refroidi, mais il voudrait bien prendre plus de place que ce volume défini. Cela crée des contraintes(1) à l'intérieur de la goutte.
Ces contraintes sont comme des forces qui appuient sur l'enveloppe de verre (c'est la même chose lorsque vous mettez de l'eau dans une bouteille en verre dans un congélateur, sauf que dans ce cas, bien souvent, la bouteille casse !). Lorsque l'on tape sur la larme batavique, elle ne casse pas, car toutes les contraintes à l'intérieur de la goutte s'opposent à la force exercée par le marteau. En revanche, lorsqu'on raye la surface ou que l'on coupe la queue, on crée un point faible dans l'enveloppe de verre, rompant ainsi l'équilibre : l'enveloppe n'arrive plus à contenir toutes les contraintes et celles-ci se libèrent en faisant exploser en fine poussière la goutte de verre.


  1. (1) Ce sont ces contraintes que l'on observe sur l'image. Elles sont apparentes grâce une méthode expérimentale appelée photoélasticimétrie.