Aujourd'hui nous ne nous intéresserons pas aux origines physiques du temps, autrement dit le Big Bang, mais à ses origines historiques, et pour cela il faut remonter aux premières civilisations. Cependant, bien avant celles-ci(1), l'Homme avait déjà acquis de bonnes bases sur les cycles solaires, lunaires et saisonniers qui lui permettaient de mesurer grosso modo le temps qui passe. À cette époque, où il était nomade, l'Homme n'avait pas besoin de plus. Mais lorsqu'il s'est sédentarisé, qu'il a fondé les premières cités (vers le XXXVe siècle avant J.-C.), un besoin croissant d'organisation s'est fait sentir. Cette organisation passait par un découpage plus précis du temps.

Mais avant de s'intéresser au découpage de la journée, rappelons brièvement quelques éléments quant au découpage de l'année à travers le calendrier. L'origine du calendrier, ou plutôt des calendriers, se perd dans le fond des temps(2). Néanmoins les archéologues s'accordent à dire qu'ils représentent les premiers témoignages d'une tentative de découpage et d'organisation du temps. L'année calendaire était définie, suivant les astronomes, entre 360 et 365 jours solaires(3). Elle était découpée en 12 mois de 29 à 31 jours qui correspondent plus ou moins aux cycles lunaires. D'autres rythmes s'ajoutaient à ces cycles, tels que les saisons ou les crues du Nil pour les Égyptiens.

Le besoin d'organisation du temps semble découler de nécessités pratiques en matière de rites, tels que fixer la date d'une fête religieuse dans l'année, ou pratiquer les cérémonies quotidiennes dans un temple. Après établissement d'un calendrier, l'Homme s'est ensuite attaché à subdiviser les jours. Pour cela il utilisa le principe du cadran solaire(4) : l'ombre projetée par un bâton (le gnomon) planté dans le sol permet d'associer une durée à un angle. Le demi-cercle que parcourt l'ombre(5) peut donc être divisé en angles : 6 divisions chez les Sumériens, 12 chez les Égyptiens. Le chiffre 12 est probablement lié au nombre de cycles lunaires dans l'année ou au nombre de phalanges d'une main (moins le pouce). Cette division du jour en 12 parties, qui prendront plus tard le nom « d'heures », s'imposa dans tout le bassin méditerranéen et au Proche-Orient au fil du temps. De même la nuit fut aussi divisée en 12 heures, ce qui donne nos journées de 24 heures.

L'heure fut ensuite divisée en 60 minutes, qui elles-mêmes furent divisées en 60 secondes. Les Babyloniens ou les Sumériens sont semble-t-il responsables de l'utilisation du système sexagésimal (base 60) pour subdiviser les heures, plutôt que le système décimal (base 10) utilisé notamment par les Égyptiens. Le nombre 60 possède un grand nombre de diviseurs, ce qui est bien pratique pour diviser les angles, et il correspond à la durée en jours de deux cycles lunaires. Minutes et secondes se retrouvent d'ailleurs dans les mesures d'angles comme sous-unités du degré. Si aujourd'hui la seconde d'arc et la seconde (temps) ont des définitions différentes, elles ont pourtant la même origine.

Le temps étant subdivisé, il ne restait plus qu'à le mesurer, mais cela est une autre histoire.


  1. (1) « Un temps que les moins de 20 000 ans ne peuvent pas connaître… »
  2. (2) Façon polie de dire que les archéologues ne sont pas d'accord sur la question. Cela nécessiterait un omnilogisme à part, rien que pour présenter toutes les hypothèses.
  3. (3) Dès le IIIe siècle avant J.-C. les Égyptiens avaient remarqué que l'année solaire durait en fait 365¼ jours et que pour recaler l'année calendaire avec l'année solaire, il fallait rajouter un jour intercalaire tous les quatre ans environ. L'astuce sera reprise dans le calendrier Julien au Ie siècle avant J.-C. puis améliorée dans le calendrier Grégorien au XVIe siècle après J.-C. avec la définition de l'année bissextile.
  4. (4) Ou le cadran lunaire, le principe étant le même, mais appliqué à la lune pendant la nuit.
  5. (5) Ceci est valable aux basses latitudes où le soleil est à son zénith à environ 90° du sol. Aux latitudes plus élevées, l'ombre d'un gnomon parcourt moins qu'un demi-cercle car les jours sont plus courts. Aux hautes latitudes, il faut en plus prendre en compte la durée variable du jour en fonction des saisons.