Pierre qui roule n'amasse pas mousse : les cailloux sur les rails
D'où vient l'expression « pierre qui roule n'amasse pas mousse » ?
Vous êtes-vous déjà demandé pour quelle raison les rails de chemin de fer étaient à-demi enterrés sous de petits cailloux gris ? Moi oui, et j'ai recueilli les explications suivantes :
- Les premiers voyageurs craignaient beaucoup les déraillements, qui étaient fréquents aux débuts du chemin de fer, et conjuraient le sort en jetant sous le train un caillou béni. Cette superstition s'étant répandue en même temps que l'usage du chemin de fer, les voies ferrées du monde entier sont maintenant tapissées de cailloux, qui sont souvent à l'origine même des déraillements. Comme quoi, les chemins de l'Enfer sont pavés de bonnes intentions…
- Les premières locomotives fonctionnaient au charbon. L'épaisse fumée grise qu'elles recrachaient se déposait sur la voie et ses abords après le passage du train. Ces résidus carbonés ont formé au cours du temps une plaque solide qui s'est fragmentée sous l'effet des alternances de pluie et de sécheresse et des vibrations répétées de la voie ferrée.
- Les enfants chahuteurs étaient encouragés à passer le temps en jetant un petit caillou par la fenêtre du compartiment toutes les 32 secondes exactement, ce qui permettait aux parents de jouir d'un calme absolu tant que l'enfant était absorbé par ce jeu.
De façon plus sérieuse, j'apporterai ma pierre en ajoutant que les cailloux entourant la voie ferrée ont pour rôle d'absorber une grande partie des vibrations causées par le passage du train, de maintenir les traverses, de priver de lumière la plupart des plantules qui voudraient s'essayer à pousser sur la voie, et de stabiliser le sol en drainant les eaux de pluie et en protégeant la terre des rayons directs du soleil. Ces cailloux assurent également une répartition homogène des charges sur les rails.
À l'origine, ce lit de gravier appelé « ballast » était composé de sable et de pierre, le sable ayant peu à peu été abandonné car plus difficile à trouver. Les pierres sont issues de ballastières, carrières de granite ou de diorite où les cailloux sont taillés, triés et lavés (mais oui !) avant d'être acheminés et déposés sur les voies par d'énormes machines, également nommées ballastières. La voie ferrée est posée sur une épaisseur minimale de 30 centimètres de gravier, soit environ 2 000 tonnes de gravier par km.
Ce tapis pierreux doit être réapprovisionné tous les 7 ans, et remplacé en totalité tous les 40 ans environ. En effet, les cailloux sont emportés par les eaux de ruissellement, tassés sous les rails par le passage des trains, fragmentés par les micro-chocs répétés, dérobés par les collectionneurs, colonisés par la mousse et les lichens…
Et dire qu'il y a des pierres qui se la coulent douce dans les musées !