La littérature d'expression française a bénéficié de l'apport d'un certain nombre d'écrivains issus de différents horizons. À l'image d'Amin Maalouf, ces écrivains véhiculent par leurs écrits l'image d'un ailleurs fort particulier qui apporte une touche d'exotisme et d'altérité aux œuvres littéraires. Reconnaissant son mérite ainsi que tous les efforts fournis dans le cadre du développement de la francophonie, il a fini par être élu à l'Académie française, le 23 juin 2011, au fauteuil de Claude Lévi-Strauss (29e).
Cet écrivain, né au sein de la minorité des chrétiens malikites au Liban, en 1949, a fait ses preuves dans le roman historique au sens propre du terme, qui est un genre d'une composition déconcertante et d'une hybridité paradoxale.
Entamant son parcours productif en 1983 avec Les Croisades vues par les Arabes, il fait du roman historique son genre de prédilection. Ce genre, né au début du XIXe siècle, est devenu la spécialité d'auteurs voulant faire revivre une époque dans le respect de la vérité historique en s'appuyant sur des documents authentiques ou des recherches archéologiques précises. Ces romanciers empruntent leur sujet au passé historique en s'appuyant sur un contexte référentiel dans lequel se meuvent des personnages fictifs ou réels évoluant dans des situations en partie imaginées par l'auteur. C'est précisément le cas avec le foisonnement des productions de Maalouf qui peuvent se targuer de leur appartenance à ce genre.
Cependant, en 1992, Maalouf a produit une œuvre d'une hybridité générique déconcertante. Il s'agit du roman Le Premier Siècle après Béatrice.
En effet, au-delà de l'art du récit et de la fluidité d'écriture caractérisant cette œuvre, à l'instar, d'ailleurs, de toute la production littéraire d'Amin Maalouf, nous pouvons avancer que dans Le Premier siècle après Béatrice, il n'est plus question d'une fiction narrative portant en son sein une histoire, aux couleurs de l'Orient, contée et distillée dans la trame d'un roman historique dont cet auteur est devenu spécialiste. Il est plutôt question d'une œuvre qui s'inscrit dans le tumulte que connaît le genre romanesque au XXe siècle, celui d'un roman qui se cherche et qui cherche de nouveaux modèles dans les autres genres et qui arrive parfois à les mêler.
L'analyse profonde de cette œuvre nous a permis d'avancer, qu'au-delà de l'indication péritextuelle déterminant son appartenance au genre roman, elle constitue un tout solidement construit sur une certaine hybridité générique qui s'inscrit dans une logique globale du sens.