Histoire vécue dans ma famille : une grand-mère invite à « dîner », tel jour, son petit-fils avec sa petite amie, qu'il va d'ailleurs lui présenter. Ce n'est pas une invitation tout à fait comme les autres. Au jour dit, elle ne voit personne arriver, s'inquiète, téléphone. « Mais enfin, mamie, le dîner, c'est le soir ! ». Elle n'est pas inculte, elle sait qu'il en est bien ainsi à Paris, mais pas chez elle. Et pas non plus en Belgique, en Suisse, au Canada, et d'ailleurs dans une grande partie de la « France profonde ». Ce que je raconte se passe dans le Forez mais pourrait aussi bien concerner l'est, le nord, etc.

Jusqu'au début du XIXe siècle, toute la francophonie déjeunait le matin, dînait à midi et soupait le soir, et la majeure partie continue comme si de rien n'était. Que s'est-il donc passé au temps de Napoléon ou peu après ? De joyeux noceurs parisiens se sont mis à dîner (repas de midi donc) de plus en plus tard et en sont venus, par amusement, par dérision, à décaler les termes en ajoutant un bizarre « petit-déjeuner » pour compléter. Et l'Académie a suivi, mais pas tout le monde… et les grand-mères ne se comprennent pas toujours avec leurs petits-fils.