… six-cent-six scies scient six-cent-six sirènes !

Ceci dit, nous parlerons ici des sirènes (si, si !) et pas des scies(1).

Et pour cela, revenons au début du XIXe siècle, où monsieur Charles Cagniard de Latour travaille sur la fréquence des sons. On sait déjà depuis le XVIIe siècle grâce aux travaux de Marin Mersenne que le son est une onde, qui possède une certaine fréquence.

La fréquence du son étant identique à la fréquence de vibration de l'objet qui a provoqué ce son en vibrant, il est possible de la déterminer en étudiant la vibration de l'objet en question. Mais ce n'est pas toujours simple, et les études sont limitées.

C'est pour résoudre ce problème que notre bon monsieur de Latour, ingénieur émérite, crée une nouvelle machine…

La machine à Charles.

Laquelle est composée d'un caisson relié à une soufflerie, surmonté d'un tube s'ouvrant sur un plateau à trous percés obliquement. Juste sur ce premier plateau à trous est disposé un second plateau, également troué obliquement, mais qui lui peut tourner sur lui-même (ce qui a pour effet d'ouvrir et fermer tous les trous). Enfin, ce second plateau est relié à un compte-tour qui permet de connaître la vitesse de rotation du disque.

Magnifique schéma.

Le flux d'air créé par la soufflerie fait tourner le disque supérieur(2), ouvrant et fermant les trous plus ou moins rapidement. L'air peut donc passer au-travers des trous, mais uniquement par moments, à une fréquence précise ; cette fréquence dépendant de la vitesse de rotation du disque, et donc du flux d'air.

Ce passage de l'air par à-coups rapides provoque ainsi la vibration de l'air et produit un son ; mais puisque l'on connait la vitesse de rotation du disque (grâce au compte-tour), on peut en déduire la fréquence d'ouverture des trous, et donc la fréquence du son !

Il suffit alors, si l'on veut connaître la fréquence de n'importe quel son, de placer cet appareil à côté, d'activer la soufflerie plus ou moins fort de manière à modifier le son produit. Une fois que le son de l'appareil est à la même hauteur que le son à étudier, il suffit de lire la fréquence sur le cadran, et le tour est joué(3) !

Reste à savoir comment nommer cet appareil… Son inventeur, ayant remarqué qu'il pouvait produire du son même sous l'eau, en a profité pour faire référence aux créatures chantantes marines de l'Odyssée d'Homère en nommant son invention « sirène ».

Et par ailleurs, c'est sur le même principe que fonctionneront plus tard les avertisseurs sonores des voitures de police, raison pour laquelle on les nommera de la même manière.

Est laissé au lecteur le choix de préférer les mélodies des sirènes d'Homère, ou bien les (moins mélodieuses) sirènes de police…


  1. (1) Bon, ça suffit !
  2. (2) Et ce, grâce aux trous obliques. Dans les premiers modèles, les trous étaient droits et le disque était tourné à la main ou à la manivelle, mais le résultat est le même.
  3. (3) Le tour de Latour, si je puis me permettre. Je ne peux pas ? Tant pis, trop tard.