Toujours dans ma série « Survie », et après avoir examiné le saut à travers le verre, la nourriture sur une île déserte, l'eau en pleine mer et l'espace sans combinaison, voyons maintenant comment survivre à une chute d'avion sans parachute. Une prochaine fois, je vous apprendrai comment désamorcer une bombe nucléaire. Ainsi, parés à toute éventualité, vous pourrez l'esprit en paix arrêter de lire les propos diffamatoires tenus par Meecky sur mon compte.

Mais reprenons donc notre situation initiale. Volonté de suicide, décompression brutale(1), passage par le trou des toilettes(2)… peu importe les moyens, seule compte la fin : suspendu dans les airs, vous observez avec un petit pincement au cœur votre avion qui s'éloigne (ou qui explose).

Mauvaise nouvelle : vous allez probablement mourir. Bonne nouvelle : à 10 km d'altitude, vous avez du temps. Assez pour lire cet article en tout cas ! Quoique… l'hypoxie ne va pas tarder : l'oxygène étant rare à une telle hauteur, votre cerveau risque de se déconnecter. Pas de souci : on se retrouve dans 4km, d'ici là vous aurez retrouvé vos esprits.

C'est bon ? Parfait. Faisons vite, il vous reste 2 minute et 5 secondes avant de retrouver – brutalement – le plancher des vaches. Partons du postulat qu'admirant le paysage, vous décidez de ne pas mourir pendant votre chute. Ou, plus difficile, lors de votre atterrissage.
Vous pouvez grosso modo contrôler votre direction (à cette hauteur, vous pouvez vous décaler de près de trois kilomètres horizontalement) : mettez-vous à plat ventre afin de freiner au maximum votre descente. De cette position, vous pouvez aussi choisir votre point d'impact. Mais lequel ? Une verrière(3), de l'herbe pourraient faire l'affaire. Des buissons ont sauvés de multiples autres personnes dans votre cas. Les marécages ou la neige sont parfaits ; et on trouve même une personne qui survécut en rebondissant sur des câbles hautes tensions. Attention, ne suivez pas votre instinct : évitez à tout prix l'eau, qui à une telle vitesse est aussi dense que du béton(4). Continuez d'offrir à l'air votre plus grande surface de contact (sur le ventre, bras tendus), il va maintenant falloir faire un choix.

En effet, deux possibilités s'offrent à vous : arriver à plat pour répartir au maximum la pression (tel que conseillé par le journal WarMedicine) ou arriver debout, pieds collés, genoux(5) et hanches légèrement repliés (tel que conseillé par la Federal Aviation Agency, et tel qu'effectué par la plupart des survivants). Dans tous les cas, n'atterrissez pas sur la tête ! Si vous choisissez l'arrivée à plat, présentez vous sur le ventre : tant pis pour votre joli minois, mais vous pouvez être sûr que dans le cas contraire vous briserez vos cervicales.
Si vraiment vous ne pouvez pas éviter l'eau (crash au dessus de l'océan par exemple), deux solutions s'offrent à nouveau à vous (bien entendu, disqualifiez l'arrivée horizontale qui vous vaudrait un plat carabiné) : « en bouteille », raide comme un i, ou « en plongeur », les mains tendues, doigts liés pour briser la surface de l'eau et protéger la tête. Si vous choisissez l'arrivée en bâton, pensez à serrer les fesses pour des raisons que vous comprendrez aisément.
Quelle que soit votre surface d'arrivée, conservez le plus longtemps possible la position allongée : elle vous ralentit en dessous de 200km/h, même à la vitesse terminale(6).

À tout moment, ne vous laissez pas atteindre par le découragement : votre état d'esprit reste extrêmement important. Pensez que la limite mortelle pour une chute n'est que de 10m ! Et encore, eux n'ont pas le temps d'admirer le paysage ou de préparer leur atterrissage comme vous pouvez le faire. Haut les cœurs, tout n'est pas fini ! Sur les milliers de personnes dans votre situation, 42 personnes sont connues pour avoir survécu(7). Pourquoi déprimer ?

De toute façon, il n'est maintenant plus temps de réfléchir ; lire cet article a fait passer agréablement le temps, mais il faut maintenant passer aux choses sérieuses. Prenez votre position et priez.

Impact.

Toujours là ? Mauvaise nouvelle, ce n'est pas fini : considérant votre force d'arrivée, un rebond est à prévoir. Une nouvelle fois, protégez votre tête : ce serait bête de mourir après avoir survécu au gros choc !
Enfin, prévenez rapidement un médecin : l'adrénaline accumulée pendant ces deux minutes infernales vous empêchera de ressentir une quelconque douleur mais vous avez selon toutes probabilités des fractures et des hémorragies internes.
Vous êtes en mer ou perdu loin de toute civilisation, incapable d'appeler au secours ? C'est vraiment dommage. Mais c'est ici que s'arrête cet article.


  1. (1) Théoriquement impossible, les portes s'ouvrant vers l'extérieur. En revanche, si quelqu'un répandait du mercure
  2. (2) Totalement impossible : l'idée que les toilettes des avions retombent directement sur Terre est une légende urbaine tenace.
  3. (3) « Quoi ! Mais tu as dit qu'il ne fallait jamais sauter à travers une verrière ! » C'est tout à fait exact. Mais ici, il ne s'agit pas de sauter, mais de tomber : conservons le sens des priorités.
  4. (4) Maigre consolation : contrairement au béton, personne ne pourra voir votre corps réduit à l'état de peinture 2D, puisqu'il disparaîtra englouti par les flots.
  5. (5) Le simple fait de plier les genoux diminue la force d'impact par 36.
  6. (6) Contrairement à des croyances bien répandues, votre vitesse ne va pas toujours croissante : elle grandira rapidement au début pour finalement atteindre un maximum au-delà de laquelle les frottements compenseront l'accélération de la gravité. Cette vitesse terminale est très rapidement atteinte, en à peine une quinzaine de secondes.
  7. (7) Et encore. Sur ces 42 personnes, 31 ont survécu parce qu'elles se sont entourés de débris (sièges, cadavres, débris d'avion…) ralentissant ainsi leur chute et absorbant en partie l'énergie du choc.