Le thylacine, ou tigre de Tasmanie, connu également sous le nom taxonomique de Thylacinus cynocephalus, était l'un des nombreux animaux australiens disparus au cours des XIXe et XXe siècles(1). Bien qu'avant l'arrivée des premiers colons européens en Australie, son aire de répartition fut bien plus étendue(2), on ne le trouvait plus qu'en Tasmanie.

Le tigre de Tasmanie était un marsupial, tout comme le kangourou ou le koala ; autrement dit, la mère donnait naissance à un fœtus très incomplet qui finissait le reste de sa croissance dans la poche ventrale de sa mère(3).
Il ressemblait à un grand chien, au poil court avec une queue longue ; sa posture générale et sa démarche étaient toutefois inhabituelles pour un mammifère carnivore, ce qui le rendait incapable de courir. Son pelage, d'une couleur généralement jaune-brun, était couvert par une dizaine de bandes sombres(4). Le thylacine moyen mesurait une soixantaine de centimètres au garrot, faisait entre un et deux mètres de longueur et pesait une vingtaine de kilogrammes.
Sa mâchoire était puissante, sa vue bonne et son ouïe excellente (au contraire de son odorat, plutôt médiocre). Le thylacine se nourrissait principalement de kangourous, de wallabies et d'oiseaux nichant au niveau du sol.

Les loups marsupiaux, bien que rarement aperçus, furent crédités de nombreuses attaques de moutons. Des primes étaient offertes depuis les années 1830 pour chaque tête de thylacine ramenée, et entre 1888 et 1909, près de 2 200 tigres de Tasmanie avaient été tués. Il semble toutefois que le chiffre soit bien plus important.
Bien qu'on ait longtemps soupçonné que ce facteur soit le seul en cause, de nombreux scientifiques pensent le contraire : la déforestation, la concurrence avec les chiens errants et la raréfaction de ses proies auraient contribué à la fin de l'espèce.

Le dernier thylacine, au zoo de Hobart.

Quoi qu'il en soit, les thylacines étaient très rares dans la nature dans les années vingt, et le dernier tigre de Tasmanie sauvage fut abattu par un fermier en 1930. Le dernier loup marsupial mourut en captivité le 7 septembre 1936 au zoo de Hobart, à cause de négligences ; en effet, on l'avait empêché de rejoindre son abri, ce qui était indispensable pour survivre au climat extrême de la Tasmanie(5).

Tout comme le pigeon migrateur, le thylacine fut l'un des premiers animaux qu'on voulut sauver. Toutefois, les mesures officielles furent prises trop tardivement, puisque le gouvernement de l'état de Tasmanie prit des mesures le 10 juillet 1936, alors qu'on ne connaissait plus que le spécimen vivant au zoo de Hobart.

Depuis, le thylacine est entré dans la mémoire collective des Australiens comme le symbole des animaux disparus à cause de l'action des colons anglais ; il est ainsi devenu un symbole officiel de la Tasmanie. En 1999, il fut même proposé un projet de clonage par l'Australian Museum, qui fut annulé en 2005 après que les scientifiques se soient rendu compte de l'absence d'ADN utilisable.

Le thylacine est également connu pour être l'animal officiellement disparu le plus vu ; en effet, cet animal discret aurait été vu post-disparition près de 300 fois en Tasmanie, ainsi qu'en Australie et en Nouvelle-Guinée – d'où il est censé être disparu depuis plusieurs millénaires. L'observation de renards et la découverte de certains indices, alors que l'espèce est supposée n'avoir pu s'adapter à la Tasmanie, a relancé l'espoir de la découverte de thylacines dans des lieux inexplorés de l'île.

Mais seul l'avenir pourra nous dire si le tigre de Tasmanie a survécu à son extermination orchestrée par l'homme…


  1. (1) Tous ont disparu par la faute de l'homme, à la suite de l'introduction de concurrents naturels ou de prédateurs d'origine européenne (comme le chat, le renard ou le rat), l'arrivée massive de bétail et la fin des feux de brousse que pratiquaient les Aborigènes (qui permettaient un renouvellement fréquent des plantes).
  2. (2) Auparavant, on le trouvait en Nouvelle-Guinée et dans l'ensemble de l'Australie. On attribue la diminution de son aire de répartition à l'arrivée du dingo et de l'homme, mais cela n'est pas prouvé.
  3. (3) Le thylacine était toutefois remarquable du fait que la poche marsupiale était ouverte vers l'arrière, et non vers l'avant comme chez les autres marsupiaux.
  4. (4) D'où son nom de tigre de Tasmanie.
  5. (5) Un climat on-ne-peut-plus accablant : une chaleur insoutenable la journée, des températures glaciales la nuit.