Aujourd'hui où la beauté n'est pas à la vieillesse, je te vois mon cher omnilogiste, te mirer dans le miroir à la recherche de la moindre petite ridule. Et je t'entends déjà me récrier : « Que s'est-il donc bien passé pour que ma peau de pêche si lisse se fripe ainsi ? ».
Pour cela faisons un zoom à l'intérieur de nos cellules. Comme tout ce qu'il y a de vivant sur notre belle terre mère, les organismes naissent et meurent. Il en va de même pour chaque cellule de notre corps, elles possèdent une horloge biologique interne. Non bien sûr pas toutes, il existe des exceptions à la règle. À croire qu'elles sont françaises ! Mais chaque chose en son temps.

Chacune de nos cellules contient plus de 2 mètres d'ADN recroquevillé sur lui-même et réparti chez l'homme sur 46 chromosomes.

Schéma d'un chromosome

Sur les chromosomes se trouvent 8 petits « chapeaux » qui coiffent chaque extrémité de l'ADN : les télomères, du grec telos (fin) et meros (partie). Ce sont en quelque sorte les protecteurs de notre précieux ADN, ils empêchent que les gènes de l'ADN ne soient endommagés.
À chaque fois qu'une cellule se divise pour donner deux nouvelles cellules, ces chromosomes sont légèrement raccourcis par un mécanisme trop complexe pour être décrit ici. La cellule perd alors quelques lettres(1) de son ADN aux extrémités de ses chromosomes.

Au début, le raccourcissement des chromosomes se fait au niveau des télomères et cela n'entrave pas le bon fonctionnement de la cellule puisque les télomères sont constitués d'ADN non codant c'est-à-dire qui ne code pour aucun gène. Ils n'ont donc aucun rôle sur le fonctionnement de notre organisme(2). Le problème c'est que plus les télomères diminuent et plus on se rapproche de l'ADN codant, jusqu'à le raboter et alors il y a perte d'information génétique. Dans ce cas là ça devient très grave !

Heureusement, il n'est pas possible d'atteindre le stade où il n'y a plus de télomères. Lorsque la taille de ceux-ci devient trop critique pour protéger l'ADN, la cellule meurt par mort cellulaire programmée. Ainsi, les cellules entrent progressivement en sénescence au fur et à mesure que les télomères raccourcissent(3) tout au long de notre vie ce qui nous amène nous même à vieillir(4).

Les cellules ont donc une horloge biologique interne : le raccourcissement des télomères. Si bien que lors d'un clonage c'est-à-dire lorsqu'un être vivant est créé à partir de l'ADN d'une cellule préexistante et bien le clone possèdera alors un ADN déjà âgé, même s'il est jeune son ADN est vieux.

Mais…
Les cellules de la reproduction et aussi, malheureusement, les cellules cancéreuses n'ont pas ce souci car elles possèdent la protéine, la télomérase, qui reconstitue les télomères après chaque division ! Les cellules ne vieillissent pas et n'ont pas besoin d'être éliminées, elles sont donc immortelles(5). L'inhibition de la télomérase semble être une voie prometteuse dans la recherche de soins contre le cancer.

Ah si seulement toutes nos cellules pouvaient l'avoir !

Les bactéries quant à elles possèdent un ADN circulaire. Il n'y a donc pas d'extrémité susceptible d'être altérée. Ainsi les bactéries peuvent se multiplier à l'infini puisqu'il n'y a pas de notion « d'âge cellulaire » ou, tout du moins, pas sous cette forme. Que la nature est bien faite !


  1. (1) Rappelez vous : ATCG, les quatre lettres de l'alphabet de la vie.
  2. (2) Cette affirmation est à prendre avec des pincettes. En réalité on ne sait que très peu de choses sur les télomères et c'est un sujet très étudié sur lequel on a peu de certitudes. On ne connaît pas encore vraiment les rôles des télomères.
  3. (3) Là encore si les scientifiques s'accordent à dire qu'il y a une réelle corrélation entre vieillissement et télomère il n'y a, à l'heure actuelle, pas d'explication claire et les processus de sénescence sont surement bien plus complexes que cela.
  4. (4) Notons que la Progeria ou Syndrome de Hutchinson-Gilford, une maladie génétique extrêmement rare, provoque des changements physiques ressemblant fort à une sénescence accélérée et pourraient être due à un raccourcissement trop rapide des télomères.
  5. (5) En plus d'avoir la capacité de se multiplier beaucoup plus que les autres.