Il y a quelques temps sur ce même site, était évoqué la conquête de l'Antarctique. L'omnilogisme d'aujourd'hui s'intéresse plus en détail à un des évènements mentionnés, l'expédition Endurance de Sir Ernest Shackleton.

L'histoire commence en décembre 1911, lorsque le norvégien Roald Amundsen est le premier homme à atteindre le Pôle sud, devançant l'anglais Falcon Scott de trente-trois jours(1). Avant cela, deux autres expéditions anglaises avaient échoué. Une d'entre elles était dirigée par Ernest Shackleton. Cette expédition fut abandonnée à 180 kilomètres du but, faute de provisions.

Dans ce contexte, Ernest Shackleton demanda le financement d'une nouvelle expédition, l'Imperial Trans-Antarctic Expedition, pour réaliser la première traversée du continent Antarctique. Un seul autre explorateur, un allemand, l'avait tentée en vain. À l'aide d'une collecte de fonds menée auprès du gouvernement, des entreprises et du grand public britannique, Shackleton réunit plus que la somme minimale qu'il avait évaluée, £50,000 de l'époque, soit environ 4,5 millions de nos euros.

Grâce à cet argent, il acheta deux navires, un trois-mâts goélette qu'il rebaptisa Endurance et un voilier à vapeur : l'Aurora. Il lança en sus une annonce le premier janvier 1914 dans les journaux pour laquelle il reçut apparemment cinq mille réponses positives. La légende veut qu'elle stipulait ce qui suit, mais cela a par la suite été contesté :

Cherche hommes pour voyage incertain, petits gages, froid rigoureux, longs mois de nuit complète, danger permanent, retour incertain. Honneur et reconnaissance en cas de succès.

— Ernest Shackleton ( ?)

Le plan de Shackleton prévoyait la mission en deux parties. L'Endurance devait déposer dans une baie de la mer de Weddell les quatorze hommes et soixante-neuf chiens qui allaient effectuer les 2 900 kilomètres de la traversée de l'Antarctique jusqu'à la mer de Ross. L'équipe sur l'Aurora devait accoster dans la mer de Ross, et établir une série de dépôts d'approvisionnement jusqu'au glacier Beardmore au 82°30'S.

Plan de Shackleton

Sous l'impulsion de Winston Churchill himself, Shackleton et l'Endurance lèvent l'ancre de Plymouth le 9 août 1914, d'abord jusqu'à Buenos Aires puis jusqu'à Grytviken en Géorgie du Sud. Attendant que le pack(2) se réduise un peu, ils appareillent de nouveau le 5 décembre, se frayent un chemin entre les blocs de glace, se rapprochent de leur objectif, dépassent la latitude de 76° Sud à la mi-janvier 1915. Shackleton juge que le navire est encore trop loin de la côte pour lancer l'expédition. Il regrettera cette décision. Le 19, le navire se retrouve prisonnier des glaces pour un bon bout de temps.

Commence alors une longue de période d'obscurité et de dérive. Shackleton espérait encore à ce moment-là être libéré au retour de l'été. Cependant, lorsqu'à partir d'août les séquences fissure de la glacefermeture violente se multiplient, Shackleton et le capitaine du navire, Franck Worsley se rendent à l'évidence et admettent que les chances de survie du navire sont infimes.

Le 24 octobre, la pression de la glace enfonce le flanc tribord de l'Endurance. Des fissures apparaissent et l'eau commence à s'engouffrer dans le navire. L'équipage essaiera de pomper l'eau pendant trois jours, avant de se résigner, d'évacuer le navire par -25 ℃ et de sauver tout ce qui peut l'être. L'Endurance est alors au 69°05'S. La dérive vers le nord-ouest aura fait perdre environ un millier de kilomètres à l'expédition.

Avec la perte de quantité de matériel et de provisions, l'objectif transcontinental est abandonné. Le 21 novembre 1915, l'Endurance s'enfonce sous la surface glacée. L'équipage tente par deux fois, une fois en novembre, une fois en décembre, de se mettre en marche vers l'île Paulet, où Shackleton avait fait construire un dépôt de nourriture pour une précédente expédition. Devant l'extrême difficulté de marcher sur le pack défoncé à cause des pressions gigantesques qui s'exercent, ces tentatives échouent. Ils ne parvenaient à parcourir en effet qu'entre deux et trois kilomètres par jour !

Finalement, alors qu'une rupture de la banquise devient imminente, les hommes(3) sautent dans les trois canots qu'ils avaient conservé. Commence alors un des exemples de combat pour la vie les plus remarquables de ce siècle. Mais la suite sera pour un prochain omnilogisme.


  1. (1) Ce dernier en plus mourut lors du retour contrairement à Amundsen.
  2. (2) Blocs de glace d'eau salé, contrairement aux icebergs.
  3. (3) Les chiens ont tous été abattus.

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