Salut à toi, lecteur toujours fidèle !
Salut à toi, lecteur occasionnel !
Salut à toi, lecteur qu'on dépucelle !
Salut à toi, quatrième rime en [Ɛl](1) !

Mon cher lectorat, comme vous ne vous en êtes certainement pas aperçu, le foisonnement d'articles auquel ce site vous a habitué est en passe d'être mis à mal. En effet, nombre d'entre vous, marqués au fer rouge du titre d'auteur, ont dû recevoir force messages les enjoignant à prendre la plume et à pondre, tant bien que mal, de quoi alimenter la furie correctrice des censeurs, la folie classificatrice des taggeurs, le dada concisionnel des accrocheurs, l'incontrôlable investigabilitude des reffeurs et l'apathie molle(2) des admins.

Car oui ! L'heure est au rationnement, mes bons amis ! Les hordes beuglantes de l'indigence articulaire sont à nos portes ! Un quignon de pain par personne et par semaine ! Les pommes à 10€ les 500 g et les topinambours comme dernier terrain vague(3) !

Bref, face à la pénurie d'articles et au manque de bonne volonté de nos chers auteurs, j'en connais certains qui risquent de se faire appeler Arthur !

Pourquoi Arthur et pas Philippe ? Bonne question, à laquelle nous allons, ensemble, tenter d'apporter un début de réponse.

N'en déplaise aux antimilitaristes, l'explication la plus répandue nous vient de l'armée allemande, celle qui sévit dans la première moitié du siècle dernier et de notre pays(4). À l'époque, déambuler la nuit bras dessus bras dessous avec la femme qu'on aime au gré des rues n'était pas particulièrement bien vu de la part de nos amis d'outre-Rhin, ce que l'on peut comprendre(5). Grognons, ils instaurèrent donc un couvre-feu dans la zone occupée et tançaient vertement les resquilleurs en leur rappelant avec force l'heure à laquelle ils étaient censé être chez eux : “acht uhr(6) ! ”. Le sens de la dérision et l'humour de nos anciens face à cette époque terrible faisant le reste, se faire appeler Arthur, c'est se faire engu… irlander.

En plus d'Arthur, Jules n'est pas en reste, et du reste, “se faire appeler Jules” revêt la même signification que “se faire appeler Arthur”. C'est d'ailleurs de ce fameux Jules que part l'explication suivante : un Jules était au siècle dernier un “pot de chambre”, ce qui laisserait penser que “se faire appeler Jules” était se faire traiter d'ordure. Mais Jules était aussi le surnom des “hommes”, sous-entendu les proxénètes, appelés aussi Arthur. Se faire appeler Jules ou Arthur était donc se faire insulter. Mais les proxénètes sont des êtres humains avant tout et c'est fort peu charitable pour cette noble congrégation que d'associer leurs patronyme à des insultes. La transformation de l'insulte vers l'enguirlandement est donc naturelle.

Ciel, mon mari ! me disait encore tout à l'heure Amandine. Et c'est pendant que j'étais assis sur le parapet jouxtant la fenêtre de ma coquine, nu comme un ver, mais un verre à la main(7), je réfléchissais à une autre explication, plus poétique, de cette expression.
Au XIXe siècle, Arthur était le petit nom mignon que l'on donnait aux amoureux. Et, ironie de la langue, cette charmante appellation en fut toute retournée à son passage au XXe siècle !
Mais Jules, dans tout ça ? N'est-ce pas aussi le nom qu'on donne aux amants ? Mesdames, certaines d'entre vous ont bien des jules, non ? Tout se recoupe !

Ah, quelle jolie langue que la nôtre !

Je ne sais pas pour vous, mais j'aime bien la dernière explication. Et il faudra m'en contenter, car celle-ci, pas plus que les autres, n'est attestée.

Bon, je vous laisse, j'entends le jules de ma régulière qui rentre et si je me fais attraper, je vais me faire appeler Joseph !


  1. (1)
    — Vache !
    — Mouton !
    — De quoi ?
    — C'est pas ça le jeu ?
    -… non. C'est l'autre, là, avec son article.
    — Un nouvel article ‽
    — Oui !
    — Deux en une semaine ‽ Eh beh, il se déchaîne, le pépère !
    — Carrément ! On fête ça ?
    — Champagne ?
    — Woot !

  2. (2) Mollesse toute relative, comme pourront le confirmer nombre de sommiers dont j'ai oublié les noms.
  3. (3) Bien entendu, vous vous doutez bien que je serai épargné par cette crise, ayant prévu depuis longtemps de quoi soutenir un siège. À ceux que cela intéresse, j'ai 8 tonnes de homards à négocier…
  4. (4) Je parle bien de la moitié nord, ces fiers soldats nous ayant laissé l'usufruit du sud pour résister au chaud.
  5. (5) Le célibat n'était pas un sacerdoce dans la Wehrmacht, mais essayez de trouver un Obersturmbannführer avec une paire de seins…
  6. (6) Huit heures.
  7. (7) J'ai pour habitude de disséminer à des endroits stratégiques des verres de bourbon, en cas de siège, conséquent aux retours maritaux intempestifs.