Nous sommes tous confrontés à des risques financiers : investissement risqués, confiance dans la banque, stockage de matières premières… S'il est une peur courante chez l'homme, c'est de perdre sa mise : l'aversion à la perte est bien connue pour provoquer des comportements irrationnels chez l'humain (on préfère éviter les risques quand on vise une récompense, et par un étrange renversement on préfère en prendre pour minimiser une perte.)

Dès l'Antiquité, l'homme à mis en place des mécanismes permettant de minimiser le risque encouru par l'homo economicus irrationalis.
La première assurance connue, datant de 2000 avant J.-C. prend le nom de prêt à la grosse aventure (un nom poétique s'il en est). Il s'agit d'un prêt consenti bien au delà des taux d'usure habituels (jusqu'à 20 % quand l'usure standard ne dépasse pas 4%). Ce prêt est bien particulier, car il doit servir à financer un voyage maritime. Seule condition : en cas de naufrage, le prêt n'a pas à être remboursé. Le prêteur partage donc le risque de l'armateur, en espérant une forte plus-value mais en prenant le risque de tout perdre.

Il faut attendre 1000 avant notre ère pour que le risque se mutualise et devienne acceptable. Cette assurance s'applique toujours pour les navires (beaucoup d'argent, beaucoup de risques) : les navires qui arrivent à bon port paient une « taxe » pour rembourser ceux qui ne sont pas arrivés

De nos jours, l'assurance prend de nombreuses formes : logement et vie, souvent complexes à comprendre (les contrats sont rarement lus !) ou pour son automobile. Il est obligatoire depuis 1958 d'avoir une assurance pour son véhicule (qui doit couvrir « toute personne ayant la garde, ou la conduite même non autorisée du véhicule ainsi que les passagers du véhicule », et ce pour tout « engin destiné au transport de personnes ou de choses circulant sur le sol mû par une force motrice »(1)). La variété des contrats et des situations empêche l'exhaustivité, mais le principe reste le même : en payant une somme faible mais récurrente, l'assuré cotise et pourra, en cas de sinistre, être remboursé des dommages.
Avec le temps, de nombreuses subtilités sont venues se greffer sur les assurances auto ; par exemple le système de bonus / malus pour récompenser les « bons » conducteurs. Le cœfficient de réduction, compris entre 0,5 (on paie moitié moins) et 3,5, débute à 1 : puis chaque année sans accident, l'assuré bénéficie d'un bonus (on multiplie la prime de l'année précédente par 0,95). Il faut donc 13 ans sans accident pour bénéficier du bonus maximal !
En cas d'accident (dont la responsabilité est totalement imputée à l'assuré), la prime d'assurance est multipliée par 1,25 (et ce autant de fois qu'il y a eu d'accidents). Partiellement responsable ? Le malus n'est « que » de 1,125.

Il est intéressant de remarquer qu'il s'agit d'un système perdant pour la plupart des gens, mais la méconnaissance du futur rend le système utile et rentable pour tous – de la même façon que la sécurité sociale : tout le monde paie, en espérant ne jamais devoir « profiter » du service pour lequel il paie !

Maintenant, petit cas théorique. Je suis assureur, j'assure 1 000 personnes pour un risque de 1 000€. Chaque personne paie 10€ / mois. Que se passe-t-il si, par malchance particulière, tous mes assurés sont touchés par le risque ? (c'est le cas pour une catastrophe naturelle par exemple, même si les assurances font normalement très attention à ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier !). Je dois, théoriquement, fournir \(1000 \times 1000\)€… une somme bien au delà de mes moyens d'assureur !
Bienvenue dans le monde de la réassurance : les assureurs des assureurs ! Toutes les compagnies d'assurances sont réassurées, permettant un nouveau transfert de risque.
Mais pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Qui va assurer les assureurs des assureurs ? La rétrocession d'assurance ! Il s'agit d'un marché obscur, considéré comme le plus risqué : si les profits attendus sont gros, le jour où cet assureur d'assureurs d'assureurs doit payer, le montant en jeu est énorme : seules les pertes immenses peuvent remonter aussi haut dans la chaine. Récemment, l'ouragan Katrina a durement frappé cette catégorie d'assureurs (une facture de plus de 25 milliards de dollars ferait blanchir toute entreprise).
Lorsque la loi le permet, ces assureurs de troisième niveau sont simplement des réassureurs qui assurent d'autres réassureurs. Même si cela simplifie les choses, cela amène rapidement à des gros problèmes, chaque réassureur réassurant plusieurs réassureurs, créant une spirale vicieuse pouvant potentiellement amener un réassureur à posséder de façon très indirecte des parts de lui-même – et donc à assurer ses propres risques !


  1. (1) Ce qui inclut donc aussi les chariots élévateurs !