Grande question culturelle que celle-ci : pourquoi le héros des blagues se nomme-t-il Toto ?
Chaque langue possède ses petites particularités. Ainsi, le little Johnny britannique, le Pepito mexicain ou le Totos grec ont chacun leur histoire. Mais qu'importe ; ce qui vous pique, vous taraude et vous fait me supplier de poursuivre(1), c'est bien notre ami Toto.

Mise en situation :

C'est Toto qui est en classe. La maîtresse interroge les élèves pendant le cours de français.
« Combien y a-t'il de lettres dans l'alphabet ? »
Comme toujours, Toto lève la main et répond.
« Il y a 8 lettres, madame »
La maîtresse s'étonne et demande à Toto de réciter pour compter les lettres.
« Alors : A, L, P, H, A, B, E, T… huit lettres, madame ! »

Je passe rapidement sur la profondeur humoristique pour enfin m'orienter vers la réponse au sujet. Toto, d'où qu'il vient ?

Considérons si vous le voulez bien le personnage en lui-même. Toto est donc un enfant, naïf et ingénu, qui présente la particularité de ne jamais dépasser le premier degré de pensée là où ses interlocuteurs stagnent aux deuxième et troisième degrés(2). Vous connaissez le principe : dialogue déséquilibré, déstabilisation du lecteur, humour, bonne ambiance.

Votre serviteur s'est penché sur les antécédents d'un tel personnage. Du plus loin que j'ai pu remonter avec des sources compréhensibles, Toto apparaît en 1892. Il est en effet personnage phare dans la pièce Les farces de Toto : folie vaudeville en 1 acte, par Emile Durafour. Dès lors, le genre est fixé et on le retrouve régulièrement dans le même type de rôle, comme dans On purge bébé, de Georges Feydeau, ou plus tard avec le dessinateur Robert Velter et sa revue Le journal de Toto.

Les sables du temps ne cessant de s'écouler, la production littéraire perd de sa superbe pour passer du coq théâtral à l'âne des Carambar®. Toto se banalise et devient l'archétype du sale gosse qui ne comprend rien et s'exprime vulgairement. O tempora, o mores, comme dirait mon pote Cicero(3).

Une dernière pour la route :

Toto s'engage dans l'armée. Sa mère lui fait quelques recommandations.
« Quand le sergent te demandera quel âge tu as, tu lui répondras : 10 ans. Quand il te demandera comment tu t'appelles, tu lui diras : Toto, monsieur. Et quand il te posera une question, tu répondras : Oui chef !
Toto se présente devant le sergent-chef…
— « Comment t'appelles-tu ?
— Dix ans.
— Quel âge as-tu ?
— Toto.
— Tu te fous de ma gueule ?
— Oui chef ! »

Désolé.


  1. (1) Ne niez pas, je sens ces choses-là.
  2. (2) Voir en illustration l'excellent Point culture sur l'humour. Je mets un lien en sources.
  3. (3) J'élude le « n » pour faire classe. L'ancien latiniste qui se la pète, en somme.