Ces mots auraient été prononcés par Jacques de Molay, grand-maître de l'Ordre des Templiers, lors de son supplice sur le bûcher de l'île aux Juifs à Paris le 19 mars 1314.

L'Ordre souverain des Chevaliers du Temple de Jérusalem fut fondé en 1128 par Hugues de Payns pour assurer la garde des Lieux Saints de Palestine et protéger les routes des pèlerinages. Cette force militaire extrêmement organisée accompagna toutes les Croisades. Amassant de grandes fortunes par leurs pillages des villes conquises, étant exemptés d'impôts, ils devinrent rapidement très riches et furent sollicités par les différentes cours d'Europe pour des prêts d'argent : en quelque sorte, ils furent les premiers banquiers de l'histoire !
Mais au XIVe siècle, le roi de France Philippe IV (dit le Bel), lourd débiteur de l'Ordre, décide de s'attaquer aux Templiers afin de s'approprier leurs richesses. Guillaume de Nogaret, son Garde des Sceaux, est chargé de mener l'« enquête » et le procès qui doit éliminer l'Ordre des Templiers.

Le vendredi 13 octobre 1307, Jacques de Molay, le grand-maître, et les 140 Chevaliers de la maison-mère sont arrêtés à l'Hôtel du Temple par Guillaume de Nogaret, sous des chefs d'inculpation douteux (profanation de la croix, idolâtrie d'une tête de chat, sodomie), tout comme des centaines d'autres Templiers de Province(1).

Le procès dure près de sept ans et, un à un, sous les tortures prodiguées par Guillaume de Nogaret, les Chevaliers du Temple finissent par avouer les crimes imaginaires qu'on leur impute. Sous la pression de Philippe le Bel, le pape Clément V émet le 3 avril 1312 la bulle Ad providam, annonçant la suppression de l'Ordre.

Le 18 mars 1314, Jacques de Molay, emprisonné depuis sept ans dans la prison du Temple, est conduit devant la cathédrale de Notre-Dame de Paris pour entendre le verdict du procès, en compagnie de Geoffroy de Charnay, précepteur de Normandie, de Hugues de Payraud, visiteur général de l'Ordre, et de Geoffroy de Gonneville, Commandeur d'Aquitaine. La sentence des juges ? La prison à vie. Mais Jacques de Molay et Geoffroy de Charnay haranguent la foule, affirmant que leurs aveux ont été volés, que les Templiers n'ont commis aucun crime et sont victimes d'une machination. Les deux hommes sont alors condamnés au bûcher(2).

Le lendemain, 19 mars 1314, sur le bûcher dressé sur l'île aux Juifs (en face du Palais de la Cité) Jacques de Molay s'écrie : Pape Clément ! Roi Philippe ! Avant un an, je vous cite à paraître au tribunal de Dieu pour y recevoir votre juste châtiment ! Maudits ! Maudits ! Tous maudits jusqu'à la treizième génération de vos races !

Ironiquement, la malédiction du grand-maître allait s'avérer exacte : Clément V décède le 20 avril 1314 d'étouffement. Philippe le Bel meurt dans la nuit du 26 au 27 novembre 1314 d'un ictus cérébral ; ses trois fils mourront dans les douze années à venir, sans laisser de descendance mâle, mettant fin à la lignée des Capétiens directs.


  1. (1) Une légende récente – popularisée par le Da Vinci Code – affirme que c'est depuis ce jour que l'on dit que le vendredi 13 porte malheur. En fait l'origine de cette superstition serait plus ancienne, et on peut la faire remonter à la Cène biblique, voire à certaines mythologies. Pour votre culture, la crainte des vendredis 13 est appelée la paraskevidékatriaphobie, tandis que la crainte du nombre 13 en général est la triskaidekaphobie.
  2. (2) Contrairement à l'affaire du courrier de Lyon, les révélations post-procès ont eu une influence…